En outre, à ceux qui n'ont pas les moyens de devenir locataires dans le parc privé, vous dites : « Devenez propriétaires ! » Or, je rappelle que 70 % des personnes qui demandent un logement ont des revenus équivalents aux plafonds de ressources les plus bas. Croyez-vous que l'accession, même sociale, à la propriété soit pour elles une alternative ? Pour ma part, je ne le pense pas.
Certes, madame la ministre, l'accession sociale à la propriété reste effectivement un objectif à atteindre. Les Français, dans leur grande majorité, aspirent à devenir propriétaires, et nous devons les y aider. Mais lorsqu'une crise sans précédent touche les milieux les plus populaires, c'est à ces derniers que doivent s'adresser tous nos efforts. La réalisation des aspirations de certains ne doit pas pénaliser le traitement d'une urgence sociale.
Il est possible de concilier la nécessité d'accroître le parc locatif social avec la demande légitime d'accession à la propriété. Il suffit pour cela de ne pas inclure cette dernière dans le calcul des 20 % de logements sociaux. Ou bien, si vous souhaitez l'intégrer dans ce calcul, il ne faut le faire que dans les seules communes disposant d'un parc locatif social déjà supérieur à 20 %. Tel est l'esprit des amendements que nous défendrons.
Mais vous ne pouvez en aucun cas confondre accession à la propriété et demande de logement locatif social ! En effet, le plus souvent, les demandeurs de logement ne sont pas de futurs propriétaires.
Qui sont-ils en réalité ? Ce sont toutes les personnes auxquelles leur situation sur le marché du travail ne permet pas de trouver un logement au prix du marché, qui enchaînent les périodes d'inactivité et les petits boulots ; toutes celles que les bailleurs n'acceptent pas comme locataires en raison de leurs revenus instables ; toutes celles auxquelles les banques refusent un emprunt pour devenir propriétaire.
En tout état de cause, la disposition dite « amendement Ollier » ne répond pas à la nécessité d'offrir un logement locatif social à ceux qui en ont le plus besoin et ne s'adresse pas à ce public prioritaire.
Désormais, pourront être comptabilisés dans les 20 % de parc social les logements achetés à l'aide du prêt à taux zéro qui profite, rappelons-le, à des ménages disposant de 6 000 euros de revenus mensuels. Il est évident qu'un tel dispositif ne profitera pas aux Français les plus modestes.
La modification proposée de l'article 55 de la loi SRU témoigne, au mieux, de la vision déformée que vous avez des besoins en matière de logement. Au pire, elle est une nouvelle manifestation de la volonté affichée par la majorité de contourner l'obligation faite aux élus locaux de créer des logements sociaux.
L'urgence du rétablissement de la mixité sociale dans les grandes agglomérations nous a été une fois de plus rappelée de manière cruelle à l'automne dernier. Les discussions sur l'article 5 bis B fournissent, je crois, l'occasion d'apporter une réponse sans équivoque à cet enjeu.
Il ne faut pas tomber dans l'amalgame : personne, dans cette assemblée, ne désignera du doigt les élus qui rencontrent des difficultés à mettre en oeuvre l'article 55 de la loi SRU, mais trop d'élus contournent délibérément la loi. Remettre en cause aujourd'hui cette disposition constitue une véritable provocation pour des millions de Français ! §