Madame la ministre, si vous prêtez une oreille distraite aux parlementaires de l'opposition, écoutez au moins les vingt-quatre associations dont l'appel est paru dans les principaux quotidiens nationaux le 31 mars 2006. Tous vous disent : « Ne touchez pas aux 20 % de logements locatifs sociaux. Il en va de la dignité des personnes. Il en va de la dignité de la France !»
Tout en regrettant l'absence de M. Borloo dans cette enceinte, je souhaite revenir un instant sur les propos tenus jeudi dernier par votre collègue devant notre assemblée, lors des questions d'actualité au Gouvernement. Son insinuation relative au financement politique de l'appel que je viens de lire, mêlée à d'autres allégations issues de l'hémicycle, est sans fondement, et par conséquent inacceptable. Elle constitue une injure aux associations, qui se mobilisent chaque jour et apportent une aide précieuse à toutes celles et à tous ceux auxquels la France ne garantit malheureusement pas le droit au logement. Les associations suppléent tant bien que mal - et plutôt bien - les carences de la puissance publique. Elles apportent le soutien à l'accès au logement que l'État assure insuffisamment, envisageant même de le réduire aujourd'hui.
Ces vingt-quatre associations ont donc acheté aux journaux l'espace nécessaire à la publication de leur appel. Elles l'ont financé sur leurs budgets respectifs, pour attirer l'attention des parlementaires que nous sommes ainsi que celle de nos concitoyens. On ne peut leur contester cette responsabilité ni cet engagement, face à une disposition législative qu'elles considèrent comme une menace.
Cette clarification nécessaire étant faite, les dispositions que nous nous apprêtons à discuter, notamment dans l'article 5 bis B, permettraient de comptabiliser dans les logements sociaux les logements vendus désormais à leurs occupants ainsi que l'accession aidée à la propriété. L'atteinte du seuil des 20 % sera certes facilitée pour les communes qui ne remplissent pas encore leurs obligations, mais de façon artificielle.
En effet, disons-le clairement, les modifications apportées à l'article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation ne créeront pas de logements sociaux !
Madame la ministre, mesdames, messieurs les sénateurs, dois-je vous rappeler que la loi SRU avait pour objectif d'accroître le parc de logements locatifs sociaux disponibles ?
Or, l'amendement Ollier, dans le moins mauvais des cas, neutralisera une partie du parc social existant par la vente des HLM et, dans le pire, accolera simplement à un logement, dispendieux au regard du pouvoir d'achat de nos concitoyens, une étiquette « sociale », celle de l'accession aidée à la propriété.
En effet, si la production de logements s'est globalement accrue, elle souffre néanmoins toujours, je dois le rappeler, d'une carence grave dans le domaine du logement locatif social.
Est-il opportun d'encourager ainsi la vente de logements HLM à leurs occupants, laissant les listes d'attente pour l'attribution d'un logement social s'allonger - 1 300 000 demandes aujourd'hui - pendant que l'offre elle-même sera amputée ?
Est-il opportun de réduire les obligations de production, alors que celle-ci est encore dramatiquement insuffisante dans le champ locatif ? Selon le Secours catholique - je choisis mes références pour qu'on ne puisse pas me reprocher de citer des sources gauchistes