Intervention de Serge Lagauche

Réunion du 4 avril 2006 à 22h00
Engagement national pour le logement — Article 5 bis b priorité suite

Photo de Serge LagaucheSerge Lagauche :

L'antépénultième alinéa de l'article 5 bis B prévoit de comptabiliser dans les logements sociaux au titre de l'article 55 de la loi SRU les logements locatifs sociaux vendus à leurs occupants.

Il s'agit là d'un véritable contresens par rapport à l'article 55 de la loi SRU, dont l'objet est de développer l'offre locative sociale.

La vente des logements HLM, même à leurs occupants, neutralise une partie du parc disponible alors que les listes d'attente de logement social ne cessent de s'allonger. Or, 70 % à 80 % des demandeurs inscrits sur ces listes ont des revenus représentant moins des deux tiers des plafonds de ressources ; ils ne peuvent donc se loger au prix du marché.

Le logement en France souffre d'un besoin aigu de logements locatifs abordables. Dès lors, pourquoi inciter à réduire cette offre ?

En outre, la disposition figurant à l'article 5 bis B repose sur un fondement très critiquable. Pour défendre son amendement à l'Assemblée nationale, M. Ollier a fait valoir l'argument suivant : « Le changement de statut ne change pas le caractère social du logement ». C'est faux, à un double titre.

D'abord, le changement de statut modifie drastiquement et quasi définitivement la vocation sociale du logement. Par définition, il sort du parc locatif social et n'est plus disponible.

Ensuite, l'argument de M. Ollier témoigne d'une conception de la solidarité urbaine particulièrement fallacieuse. Il semble considérer que, dans la mesure où les occupants ne changent pas et restent une charge pour les communes, on peut continuer à les faire apparaître dans l'effort communal en faveur du logement social.

Mais l'objet de la loi SRU est une affaire non pas d'occupation et de contenu, mais d'offre de logements accessibles et, par conséquent, de contenant. Cette loi vise non pas à répartir des personnes, mais à créer les conditions du logement pour tous sur l'ensemble du territoire.

Par ailleurs, la vente de logements HLM conduira les organismes à se défaire de la partie déjà amortie de leur parc, partie où les loyers sont en général inférieurs à ceux des programmes plus récents et plus valorisée en termes de localisation et de bâti. En d'autres termes, c'est la partie attractive du parc HLM qui changera de statut et ne sera plus disponible alors que le nombre de demandeurs - 1 400 000 aujourd'hui - continuera d'augmenter.

Enfin, la vente aux locataires représente un risque au regard de la solvabilité des occupants à terme. Si certains parviennent péniblement à acheter, auront-ils les moyens d'assumer les charges de la nouvelle copropriété ? Nombreux sont aujourd'hui les exemples de copropriétés dégradées, qui font l'objet d'un plan de sauvegarde, alors qu'il s'agit d'anciens logements HLM qui ont été vendus à leurs occupants parfois jusqu'à quinze ans auparavant.

Ces recettes ne sont pas neuves et, malheureusement, l'histoire de la politique de la ville ne témoigne pas de leur efficacité, bien au contraire.

Parce qu'elle neutralise une partie du parc locatif social, parce qu'elle tend à assimiler solidarité urbaine et effort d'accueil de populations défavorisées, parce qu'elle représente un risque pour les occupants acquéreurs eux-mêmes, la vente de logements HLM ne doit pas être encouragée et ne peut, en tout état de cause, être comptabilisée au titre du logement social.

Quant à la création d'un guichet unique, n'ayant aucune valeur normative, elle n'a aucune raison d'apparaître dans un projet de loi. Néanmoins, si cette création devait absolument recevoir une consécration législative, il conviendrait de lui apporter des aménagements et, à tout le moins, de prévoir que les EPCI puissent s'engager dans une telle démarche. En effet, les EPCI compétents en matière de programme local de l'habitat doivent pouvoir intervenir sur l'ensemble des leviers des politiques de l'habitat. Il serait incohérent que le PLH soit piloté par l'EPCI, tandis que le guichet unique, accession aidée à la propriété, serait pris en charge par la commune.

Ouvrir cette possibilité aux EPCI revêtirait un caractère de cohérence du point de vue des compétences des équipes, de la circulation de l'information et d'une meilleure lisibilité pour les usagers.

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