Premièrement, on nous dit que l'accession sociale à la propriété est une bonne chose et qu'elle correspond au désir de nos concitoyens. Deuxièmement, on nous parle de l'impérieuse nécessité d'atteindre l'objectif de 20 % de logements sociaux - en fait, c'est plutôt de notre côté de l'hémicycle que cet objectif est affirmé.
Or nous ne comprenons pas pourquoi les logements acquis dans le cadre de l'accession sociale à la propriété devraient faire partie des 20 % de logements sociaux. Il est tout à fait possible de développer l'accession sociale à la propriété sans l'intégrer dans ce quota.
Mon cher collègue Revet, vous avez dit que cette notion avait un caractère éminemment social. Je voudrais vous faire observer que, quand le prix de l'immobilier est multiplié par deux en sept ans, quand le mètre carré atteint 2 500 à 3 000 euros dans les grandes agglomérations françaises et qu'il dépasse 5 000 euros à Paris et dans plusieurs communes franciliennes, l'accession à la propriété n'est plus très sociale. Tout au plus, peut-on parler d'accession aidée à la propriété.
Ne nous leurrons pas, le marché immobilier éloigne actuellement de la propriété une majorité de Français, malgré les dispositifs qui ont été mis en place. Ceux qui sont malgré tout parvenus à acquérir leur logement ont dû montrer patte blanche à leur banquier : ils ont dû faire valoir des revenus suffisants, prouver la stabilité de leur situation personnelle, voire solliciter leur entourage familial afin qu'il se porte garant. Tout cela, finalement, pour s'endetter très souvent jusqu'à un tiers de leurs revenus, c'est-à-dire le plafond légal, et pour des durées de prêt encore plus longues. Les prêts sur vingt-cinq ans sont désormais monnaie courante et ceux sur trente ans, voire au-delà, font une apparition florissante dans l'offre bancaire.
Comment dès lors pouvez-vous assimiler ces logements, acquis dans les conditions que je viens d'évoquer, à des logements sociaux ? Parmi les demandes de logement social, 70 % à 80 % émanent de personnes dont les revenus ne dépassent pas deux tiers des plafonds de ressources des PLAI. Ce sont ceux-là qui ont prioritairement besoin de logements sociaux, mais ils ne pourront pas accéder à la propriété. C'est donc d'eux qu'il faut parler, et c'est par rapport à leur cas que la règle des 20 % est absolument indispensable.
Pour autant, cela n'empêche pas de favoriser l'accession sociale à la propriété. Toutefois, aucun argument ne nous a été donné à ce stade du débat pour nous expliquer pourquoi celle-ci devrait se développer dans le cadre des 20 %.