Madame la secrétaire d'État, les salariés des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées demeurent très inquiets devant le processus de révision de la convention collective nationale du 15 mars 1966 engagé par la commission mixte paritaire installée le 30 septembre dernier.
En l’état actuel des discussions, des points de clivage subsistent, comme dans toute discussion, notamment en ce qui concerne la refonte des classifications et la modification du système de rémunération, qui pourraient installer, à terme, une concurrence injustifiée entre les structures et entre les salariés. En l’occurrence, il s’agirait de supprimer intégralement cette convention. La mise en place de primes et le rôle incertain de diplômes reconnus pourraient conduire à une individualisation des salaires, fondée sur des performances essentiellement quantitatives, ce qui peut paraître choquant dans ce domaine.
Par ailleurs, cette réforme viserait à organiser des regroupements d’établissements et des fusions d’équipes afin d’obtenir d’hypothétiques économies d’échelle, au détriment de la qualité des soins et de la personnalisation du suivi dont bénéficient les patients et les usagers.
L’ensemble des acteurs impliqués souhaite parvenir à une amélioration du texte de cette convention, qui n’a pas été profondément remaniée depuis plus de quarante ans. Elle appelle, certes, des ajustements, mais la modernisation nécessaire de ce secteur ne doit pas conduire à sacrifier une diversité de l’offre, essentielle pour répondre à la multiplicité croissante des besoins et des profils.
Les professionnels restent légitimement attachés au maintien du caractère national de la convention, garant des missions de service public et du caractère non lucratif du secteur. Il n’est, en effet, pas envisageable de livrer ce secteur particulièrement sensible à une marchandisation qui affaiblirait les moyens humains et financiers qu’une société juste et démocratique a la responsabilité de déployer au service de tous, notamment des plus vulnérables.
Plus fondamentalement, au-delà du contenu de ces négociations et des positions des uns et des autres, c’est bien le cadre législatif et réglementaire qui leur a été imposé au départ, notamment par le Gouvernement, qui reste au cœur du problème.
L’article 9 de la directive Services prévoit en effet que les États membres devaient faire parvenir à la Commission une liste des services pour lesquels ils estiment nécessaire de maintenir un régime d’autorisation, que le prestataire soit national ou non. Or cette liste a été remise à la Commission en mars dernier, en catimini, quelques jours avant l’examen d’une proposition de loi déposée par notre groupe.
En outre, la loi « Hôpital, patients, santé et territoires » a contribué à généraliser la contractualisation sur appel d’offres en ce qui concerne l’octroi d’autorisations administratives d’activités, voire de missions de service public, appels à projets qui relèvent désormais des ARS. Cette stratégie du Gouvernement signe l’introduction d’une concurrence difficilement compréhensible dans les domaines sanitaires, sociaux et médico-sociaux, d’autant qu’elle va au-delà des obligations européennes.
Dans un contexte budgétaire particulièrement tendu, madame la secrétaire d’État, quels seront les impacts de cette orientation sur le fonctionnement des structures, les conditions de travail de leurs personnels et, finalement, l’accompagnement des publics vulnérables ?