Intervention de Michel Billout

Réunion du 2 mars 2005 à 15h00
Réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise — Article 1er

Photo de Michel BilloutMichel Billout :

Cet amendement prévoit que les accords fixant la définition d'un contrat à temps partiel sont passés à l'échelon de la branche et non pas à celui de l'entreprise ou de l'établissement.

Un tel amendement se justifie par le fait que, dans 80 % des cas, les horaires et les conditions de travail à temps partiel sont imposés aux salariés.

Fixer la définition de ce type d'emploi dans le cadre des accords de branche garantirait aux salariés visés une égalité de traitement et des conditions plus favorables que celles qui résultent de certains accords d'entreprise ou d'établissement, où les salariés sont davantage soumis aux pressions patronales.

Il est d'ailleurs plus qu'urgent de défendre les accords de branche en tant que références des négociations collectives. La loi Fillon du 5 mai 2004 sur le dialogue social est venue bouleverser le droit à la négociation collective. Largement inspirée par le MEDEF, cette loi a débouché sur une remise en cause des conventions collectives et sur l'éclatement des garanties des salariés.

Loin d'être un défenseur de la démocratie sociale, votre gouvernement ne cesse au contraire de fournir au patronat un arsenal de moyens pour vider de leur contenu des conventions collectives déjà très affaiblies.

En effet, la loi Fillon a complètement renversé le système qui prévalait antérieurement et qui était fondé sur le principe de hiérarchie des normes sociales. Ainsi, auparavant, la convention de branche ne pouvait être moins favorable qu'un accord interprofessionnel et un accord d'entreprise moins favorable que la convention collective.

Désormais, cette règle est devenue l'exception. Le principe de faveur ne s'applique plus, sauf si l'accord ou la convention de branche ou interprofessionnels le prévoient expressément.

Si la convention collective ne l'interdit pas formellement, c'est-à-dire si elle n'en dit rien, les entreprises négociant sur le sujet ont le droit de fixer des clauses moins favorables que celles qui sont prévues par la convention.

Un tel dispositif est une arme redoutable offerte au patronat pour vider la négociation de branche de son contenu. Or la question de la négociation collective et de ses règles est au coeur de l'affrontement avec le patronat. Celui-ci y voit une mise en cause de son pouvoir unilatéral, non seulement dans l'entreprise bien sûr, mais également dans une optique plus générale : en France, la négociation produit du droit au même titre que la loi. Il y a dans le code du travail autant de règles qui résultent d'accords nationaux interprofessionnels, plus ou moins entérinés par une loi, que de dispositions législatives introduites sous tel ou tel gouvernement.

Par le biais d'une réforme des critères et des niveaux de négociation, le patronat pourrait exercer un pouvoir législatif équivalant pratiquement à celui des élus de la nation. D'où son acharnement à combattre l'accord majoritaire, la hiérarchie des normes et la démocratisation. Quand il ne réussit pas à l'empêcher, le patronat essaie, par tous les moyens possibles, de la pervertir ou de la détourner de ses missions essentielles.

Cette proposition de loi, comme la loi Fillon, s'inscrit dans le bouleversement des relations sociales sous l'effet non seulement de la volonté du MEDEF, mais également de l'évolution du salariat, qui a d'ores et déjà considérablement fragilisé les garanties collectives : montée de la précarité, exclusion des salariés d'une solide couverture conventionnelle, perte de garantie d'emploi, entre autres.

S'agissant de l'emploi à temps partiel, qui maintient un grand nombre de salariés dans une extrême précarité, une extrême pauvreté, il est indispensable que les horaires soient définis exclusivement au niveau de la branche, seul niveau où la voix des salariés peut réellement se faire entendre.

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