Une nouvelle brèche dans l'application quotidienne du principe des 35 heures est ouverte puisque l'article 1er organise l'assouplissement du compte épargne-temps.
Les comptes épargne-temps permettent aux salariés, lorsqu'il y a un accord d'entreprise et sur la base du volontariat, de « mettre de côté » des jours de congés ou de RTT non pris. Le dispositif est très encadré puisqu'il n'est possible que d'en épargner vingt-deux par an et de les prendre dans un délai de cinq ans maximum, étant entendu que les titulaires de compte âgés de plus de cinquante ans peuvent accumuler des jours en vue de leur retraite.
La loi Fillon a déjà procédé à un assouplissement de ce dispositif, en permettant aux salariés d'accumuler des droits à congé rémunéré ou de se constituer une épargne
Avec cette réforme, le Gouvernement veut faire sauter deux verrous en faisant disparaître, d'abord, le plafond interdisant d'affecter plus de vingt-deux jours par an sur le compte épargne-temps, ensuite, la barre des cinq ans.
Le rapporteur est d'ailleurs très clair sur ce point : il considère comme des restrictions les modalités du compte épargne-temps telles qu'elles étaient fixées par la loi Aubry, alors qu'il s'agissait de protections pour les salariés. Le Gouvernement et la majorité ont donc décidé de supprimer ces « restrictions ».
Le nouveau contrat épargne-temps devient un outil permettant de différer les repos liés à la réduction du temps de travail, ainsi que les repos compensateurs liés aux heures supplémentaires, sans garantir leur rémunération horaire et majorée.
En outre, le Gouvernement voulant créer des passerelles entre ces comptes épargne-temps et des comptes d'épargne retraite, il serait admis de transformer les jours autrement qu'en jours de vacances ou de congés. Cette nouvelle possibilité nous conforte dans l'idée que vous êtes décidément très attachés aux fonds de pension, puisque c'est exactement de cela qu'il s'agit.
Permettre d'utiliser le compte épargne-temps pour alimenter un plan d'épargne retraite contribue au démantèlement du financement des retraites par la solidarité nationale, ce que nous ne pouvons évidemment accepter.
Enfin, cette proposition de loi introduit un élément contraire à la liberté de choix dont disposait auparavant le salarié : le compte épargne-temps pourra être alimenté sur l'initiative de l'employeur, alors que, jusqu'à présent, il ne pouvait l'être que sur l'initiative du salarié. Cette faculté laisse toute liberté à l'employeur, en cas de variation de l'activité, par exemple, d'affecter au compte épargne-temps des heures effectuées par le salarié au lieu de les lui rémunérer. Ce n'est pas ainsi que l'on augmentera le pouvoir d'achat des salariés !
La nouvelle logique du compte épargne-temps est donc très perverse. Elle laisse supposer que le salarié en sortira gagnant, alors qu'en réalité ce nouveau dispositif permettra à l'employeur de se dispenser de toute véritable politique d'embauche et de revalorisation des salaires.