Nous avons déjà eu l'occasion d'évoquer la vocation initiale du compte épargne-temps, que nous voudrions voir préservé plutôt que transformé en compte d'épargne.
Le CET devrait demeurer un outil permettant au salarié, selon sa propre volonté, d'accumuler des droits à congé - cela vaut surtout pour les femmes qui y ont recours pour s'occuper de leurs enfants - et non une forme régulière de rémunération servant d'échappatoire aux employeurs.
En effet, ces derniers, grâce au CET, évitent le paiement d'heures supplémentaires au taux de majoration correspondant aux heures effectuées ; ils obtiennent un crédit sans intérêts du salarié sur son propre salaire, sans indication ni limitation de durée ; enfin, en cas de plan d'épargne retraite, ils économisent sur les cotisations sociales patronales et obtiennent des dégrèvements fiscaux.
Face à ces avantages, nous cherchons vainement où se situe l'intérêt du salarié !
Sur le long terme, vous n'êtes pas capables d'obtenir qu'en cas de faillite les éléments de salaires placés sur le CET soient garantis par l'AGS. Il faut d'ailleurs reconnaître que, si ces éléments sont par trop considérables, l'association pour la garantie des salaires n'y suffira pas.
Dès lors, qu'adviendra-t-il du salarié qui voudra prendre sa retraite et s'apercevra que les cotisations sociales n'ont pas été versées, ce qui est possible avec le plan d'épargne retraite que vous plaquez sur le CET ? Comment pourra-il prendre conscience en amont de la perte subie alors que son salaire n'est déjà pas si important ?
Nous avons été, dès la loi de 2003, opposés à la monétisation du compte épargne-temps, qui présageait ce que nous constatons aujourd'hui, à savoir que le CET est un instrument supplémentaire de déséquilibre des relations sociales et des relations individuelles entre l'employeur et le salarié.
En même temps que vous vous appuyez sur la fiction de cette relation égalitaire, vous mettez en place les éléments qui la déséquilibrent très gravement. En accentuant, comme vous le faites, la monétisation et en permettant que la rémunération soit remise à plus tard, pour dire les choses simplement, vous aggravez encore le déséquilibre dans le partage de la valeur ajoutée entre le capital et le travail.