Je vais vous citer des chiffres.
Selon le bilan des accidents mortels dans le secteur du BTP en 2003, 31 décès supplémentaires ont été recensés. Ils s'élevaient à 188 en 2003 contre 157 en 2002. Avec 60 décès, les salariés âgés de 50 à 60 ans sont les premières victimes d'accidents mortels, même si cette classe d'âge, est moins exposée aux accidents du travail, du moins en nombre, que les autres.
J'ai sous les yeux une interview de M. François Desriaux, rédacteur en chef de la revue Santé et Travail, publiée par la Mutualité française.
A la question : « Que pensez-vous des résultats de l'enquête Sumer qui témoigne d'une dégradation des conditions de travail sur dix ans ? », M. Desriaux répond : « Avec l'intensification du travail, on assiste à une dégradation logique des conditions de travail. Ces résultats sont cohérents avec ceux d'autres enquêtes, notamment en ce qui concerne l'accroissement des pénibilités physiques, le renforcement des contraintes de l'organisation du travail et le développement des expositions à des produits chimiques. »
A la question suivante, « Quelles en sont les conséquences sur l'état de santé des salariés ? », il répond : « Il ne faut pas s'attendre à une baisse des troubles musculosquelettiques, qui resteront sans doute la première cause des maladies professionnelles. On peut craindre aussi que la souffrance mentale continue de progresser, avec des dépressions, voire des suicides sur les lieux de travail. Il ne faut donc pas s'étonner de l'augmentation des arrêts maladie et des mises en invalidité. En revanche, je ne suis pas certain que la chasse aux arrêts de travail constitue la réponse la plus appropriée. »
D'autres passages de ce même article reflètent tout autant l'aspect dramatique de cette situation. Dans le journal Le Monde, M. Martin Hirsch se réfère à une expérience vécue, en citant la réponse incroyable d'un responsable de la grande distribution au sujet des conséquences du temps partiel : « Ce n'est pas notre faute, si le divorce a changé la donne sociale et si ce qui convenait comme salaire d'appoint ne suffit plus comme source principale d'existence d'une famille monoparentale. »
Voilà les réponses que font les grands dirigeants des sociétés de distribution en France ! Voilà comme l'on traite la santé des salariés ! Voilà comme l'on traite la question du temps partiel !
Quatre millions de salariés voudraient travailler davantage ou sont sans emploi. C'est la réalité que M. Borloo a évoquée sur France 2.
A un journaliste du Parisien qui lui demandait s'il jugeait « tenable la promesse de Jean-Pierre Raffarin d'une baisse du chômage de 10 % en 2005 », M. Bayrou a répondu : « Inutile de dire que je n'y crois guère, surtout quand la croissance constamment annoncée n'est pas au rendez-vous. (...) Songez à la baisse des impôts : dans un pays qui a un déficit et un endettement records, l'affirmation pleine d'aplomb qu'on pourrait d'ici à 2007 réaliser la promesse mirobolante d'une baisse de 30 % des impôts, cela n'a aucun sens. »
Il me semble donc que vos réponses, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, sont à des années-lumière des préoccupations de nos concitoyens et, en particulier, de ceux dont la misère sociale s'aggrave.
Ils sont des millions à vouloir travailler plus pour gagner plus. Rappelons-le, 80 % des femmes travaillent à temps partiel. Je discute avec nombre de salariées de la grande distribution, par exemple chez Monoprix, Carrefour, Auchan, Leclerc. C'est une expérience que je vous recommande. Ces femmes aimeraient travailler plus de 15 heures...