Intervention de Jean-Pierre Sueur

Réunion du 28 février 2006 à 21h45
Égalité des chances — Vote sur les amendements

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

Nous allons faire une nouvelle tentative pour essayer, autant que faire se peut, d'améliorer ce texte.

Il s'agit bien entendu d'un amendement de repli. Mais vous constatez vous-mêmes, mes chers collègues, que, ce qui ne va pas, c'est que la période de précarité dure deux ans. Mme Bariza Khiari vient à juste titre de citer Albert Camus, qui connaissait si bien le langage, le sens des mots, la beauté des phrases, et qui soulignait que c'était finalement faire une injure que de ne pas employer les mots avec le sens qu'ils ont, le sens qu'ils portent dans leur substance même.

À cet égard, parler pour ces deux années de « consolidation », c'est totalement incompréhensible puisque pendant deux ans, tous les jours, on peut se faire renvoyer. Lorsqu'un édifice est plein de fissures, tient à peine debout, est en équilibre instable, il est très difficile de prétendre que l'on est dans la consolidation ! C'est même s'exprimer par antiphrase, parce que ce que vous proposez est le contraire de la consolidation : chaque jour, ce sera la précarité. Ce n'est pas de la consolidation ! Il y a donc un certain cynisme à parler de consolidation.

Il aurait été beaucoup plus clair de dire qu'à l'issue de ce que l'on aurait qualifié de période d'essai les personnes seraient embauchées dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée de droit commun. C'est en fin de compte ce que nous vous proposons de faire, mes chers collègues, plutôt que de constater que l'on peut licencier à tout moment, sans motif et sans cause, pendant deux ans. Certes, ce ne serait pas l'idéal à nos yeux, mais ce serait déjà mieux si la période d'essai était nommée et limitée à deux mois.

À cet égard, j'insiste beaucoup sur la jurisprudence de la Cour de cassation, car je crois, mes chers collègues, que nous devons en tenir le plus grand compte. Or vous savez bien que ce dispositif vous place dans une situation de grande fragilité juridique puisque la Cour a estimé que les périodes d'essai devaient, selon les métiers, être de trois mois, de six mois ou d'un an afin de pouvoir être qualifiées de « raisonnables », par référence à la convention 158 de l'OIT que nous avons si souvent citée. Il est tout à fait clair qu'une durée de deux ans ne relève pas de ce que la Cour pourra qualifier de raisonnable.

Instaurez une période d'essai de deux mois ! Ce ne sera pas l'idéal, mais ce sera mieux que ce que vous avez l'aplomb d'appeler « consolidation » et qui, vous le savez, est le contraire de la consolidation.

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