Ce n'est pas encore un raz-de-marée, mais le contentieux sur le CNE ne cesse de croître. Il ne faut pas douter qu'il en sera bientôt de même pour le CPE.
Le jugement rendu par le conseil des prud'hommes de Longjumeau présidé par un employeur a représenté un premier avertissement. Combien y en aura-t-il encore ?
À Quimper, la CGT du Finistère a décidé, le jeudi 23 février, de saisir le conseil de prud'hommes après la rupture de quatorze contrats en trois mois dans un même commerce de Douarnenez. Sur vingt-deux salariés embauchés sur cette période, quatorze ont été licenciés, quatre sont partis et un autre est en arrêt de travail.
Un dossier sera bientôt jugé à Fontainebleau, d'autres à Bordeaux, Aix-en-Provence et Lyon.
Ce qui nous frappe dans les cas cités par les centrales syndicales ou mentionnés dans la presse, c'est que les salariés licenciés viennent de toutes les branches, de tous les secteurs. Ce sont des cadres aussi bien que des employés. Certains ont conservé leur emploi trois semaines, le temps d'un « coup de feu ». On remarque notamment des serveurs ou des vendeurs, qui avaient été recrutés pour les périodes de solde ou les fêtes de fin d'année.
Nous voyons bien pourquoi le Gouvernement a interdit le recours au CPE et au CNE à la place des contrats saisonniers. Ce n'est pas seulement, monsieur le ministre délégué, parce que vous avez mis au point le « contrat vendanges » et que des améliorations du sort des saisonniers ont été douloureusement négociées. C'est aussi parce que vous savez pertinemment que le CPE et le CNE sont particulièrement alléchants pour un employeur qui, pour quelques jours, a besoin de personnel supplémentaire et veut pouvoir s'en débarrasser si le commerce va mal ou si la récolte est mauvaise.
Pourquoi s'embarrasser de formalités ? Un simple « au revoir » par lettre recommandée est bien plus aisé et permet de ne pas perdre de temps, ce qui nuirait sans doute à la compétitivité de l'entreprise.
Les faux CDI que sont les CNE et CPE sont moins contraignants encore qu'un contrat à durée déterminée.
Vous vous méfiez vous-même, en fait, du texte que vous proposez. Vous connaissez les dangers qu'il recèle. Ce serait vous faire insulte, monsieur le ministre délégué, vous qui êtes un ancien collègue sénateur, que de croire que vous n'avez pas mesuré tous les périls d'une aventure dans laquelle vous avez pourtant accepté de vous lancer.
CPE et CNE sont des instruments pervers de lutte contre le mouvement social. À trop vouloir gagner contre les salariés en s'attaquant au droit, le patronat va engendrer une situation nettement plus conflictuelle encore, qui se soldera par une multitude de procès, finalement beaucoup plus coûteux.
La judiciarisation des rapports sociaux est en marche. Ce n'est pas le signe d'une société qui évolue harmonieusement, mais bien la manifestation d'une absence de dialogue, d'une forme policée de violence.