Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, chers collègues, nous voici au terme de deux jours consacrés au CPE.
D'incidents de procédures en lecture contestable du règlement, tout aura été fait par cette majorité pour contourner une discussion de fond sur le CPE, discussion que nous étions prêts à mener.
Vous aurez tout tenté, et même vous aurez innové en matière de procédure pour ne pas parler de cette disposition.
C'est plus que regrettable, car le contenu de ce contrat première embauche demandait pourtant à être véritablement débattu.
Sur les principes d'abord, ce CPE est inacceptable dans la mesure où il conduit à faire reposer la précarité sur les jeunes générations, à l'inverse de l'objectif affiché d'intégration sociale et professionnelle des jeunes.
Au contraire, le CPE aboutira à mettre dos à dos les salariés sur un marché du travail de plus en plus concurrentiel. Il entretiendra cette tendance à constituer une offre de travail « au moins disant », où les travailleurs ne sont plus évalués que sur le critère unique du coût du travail que représente leur salaire.
Qui peut encore croire que cette disposition a sa place dans un texte initialement consacré à l'égalité des chances ?
Par ailleurs, ce CPE nourrit de nombreuses remarques de fond. En lui faisant prendre la suite du contrat nouvelles embauches, le Gouvernement porte ici un nouveau coup de canif au code du travail.
Ce contrat répond pleinement à la logique libérale de déréglementation du marché du travail que le MEDEF souffle à cette majorité depuis son accession au pouvoir.
Le code du travail et les droits protecteurs des salariés sont présentés comme des entraves insupportables au bon fonctionnement du marché du travail et expliqueraient largement le chômage.
Ce positionnement idéologique, que rien ne confirme dans les faits, a guidé la rédaction de ce contrat première embauche.
On se retrouve ainsi avec un contrat où, durant les deux premières années, les employeurs n'auront pas à faire la preuve de la justification du licenciement de leur salarié. Ce sera donc devant les tribunaux que les salariés pourront faire valoir leurs droits, au regard des législations européennes et des conventions internationales.
On se retrouve aussi avec un contrat où les droits ouverts à l'assurance chômage sont moins importants que dans les contrats existants.
Ce CPE est une aberration juridique, en plus de son caractère antisocial. Si vous croyez avoir répondu à la crise des banlieues, vous n'aurez fait que raviver le feu qui couvait.
Tous les appels à la raison que nous avons pu vous adresser, au travers de nos amendements, n'y ont pourtant rien fait. Vous n'entendez pas quand nous vous disons les nombreux dysfonctionnements auxquels ce CPE va mener.
Aucune de nos propositions pour tenter d'atténuer la dégradation manifeste des droits des travailleurs n'a été retenue dans ce débat « mascarade ».
Vous avez manipulé pendant deux jours des notions que vous avez vidées de leur sens.
Vous avez parlé « d'intégration des jeunes salariés », de « sécurisation des parcours professionnels », « d'accompagnement dans l'emploi », alors que c'est l'inverse que vous généralisez avec le CPE.
Nous voterons résolument contre cet article, véritable institutionnalisation de la pauvreté et de la précarité, mise au service de la rentabilité économique et financière des entreprises, auxquelles ce gouvernement est décidément entièrement dévoué.