Intervention de Aymeri de Montesquiou

Réunion du 16 juillet 2008 à 10h00
Orientation budgétaire — Débat sur une déclaration du gouvernement

Photo de Aymeri de MontesquiouAymeri de Montesquiou :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, un an après l’élection du Président de la République, les Français sont impatients de constater les effets des réformes votées par la majorité.

Tous les observateurs internationaux en conviennent, notre pays a besoin de profondes transformations pour sortir de la léthargie dans laquelle il est engoncé depuis plus de vingt-cinq ans. Il est vital que nous ne nous enfoncions pas dans une spirale sans fin de déficits et de perte de compétitivité, alors que nos partenaires bénéficient d’une croissance vertueuse. Nous en sommes tous convaincus mais, jusqu’à présent, nous n’avions que peu réagi. Le monde ne nous attendra pas. Comme l’écrivait Voltaire, « les Français arrivent tard à tout, mais enfin ils arrivent ». Donnons-lui tort et montrons-nous enfin des précurseurs de la réforme.

Sans réforme, donc sans croissance, la France ne pourra atteindre aucun des objectifs auxquels elle aspire : ni la création de richesses, ni la compétitivité, ni la paix sociale, et nous reculerons encore au sein de la hiérarchie économique mondiale. Bien sûr, monsieur le ministre, le contexte économique international accroît la difficulté de votre tâche. Mais nos compatriotes attendent des résultats, et vous le savez.

Cette situation exige de votre part, et de la part de l’ensemble du Gouvernement, une politique très volontariste, lisible et transparente. Crise des crédits hypothécaires américains aux conséquences plus catastrophiques qu’il était envisagé, renchérissement du prix des hydrocarbures, hausse continue du prix des matières premières et des produits alimentaires, surévaluation patente de l’euro : tout contribue à ralentir la croissance de la zone euro et de l’économie française. Même si l’annonce d’Alexeï Miller, président directeur général de Gazprom, selon laquelle, avant la fin de l’année, le baril de pétrole atteindra 250 dollars et les 1 000 mètres cubes de gaz frôleront les 1 000 dollars, frise l’action psychologique, elle n’est pas absurde.

L’entrée en récession, pour les deux premiers trimestres de l’année, du Danemark, pays vertueux et souvent cité en exemple, constitue un signal d’alarme fort sur les risques encourus par notre pays à moyen terme.

L’état de nos finances publiques reste très préoccupant. « Il faut arrêter la fuite en avant », déclarait encore récemment M. le Premier ministre. Néanmoins, on constate un nouveau creusement de 41 milliards d’euros au cours du premier trimestre, la dette publique dépassant désormais les 1 250 milliards d’euros, soit 65, 3 % du PIB, et ce sans tenir compte des engagements hors bilan qui excèdent les 300 milliards d’euros.

La récente hausse du taux de refinancement de la BCE à 4, 25 % vient encore surenchérir le coût des intérêts de notre dette, second budget de l’État, je le rappelle. Il serait dangereux, car irresponsable, que quiconque mise sur un surcroît d’inflation pour rogner une partie de ces engagements vu l’augmentation des coûts qui en découleraient, sauf à vouloir rembourser cette dette au détriment des ménages, déjà suffisamment mis à contribution.

Cela dit, monsieur le ministre, votre hypothèse d’une inflation à 2 % et d’un baril de pétrole à 125 dollars ne me semble pas du tout réaliste.

Je regrette, comme certains de mes collègues, que n’ait pas abouti le débat engagé sur les lois de finances, à l’occasion de la discussion du projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions de la Ve République. L’adoption de la mesure proposée aurait eu le grand mérite de contraindre chaque année le Gouvernement à présenter un budget en équilibre – c’est une impérieuse nécessité –, et aussi à renforcer la clarté et la sincérité des comptes. Le déficit de nos comptes a, de plus, pour corollaire d’affaiblir l’autorité qui devrait être la nôtre au moment où la France préside l’Union européenne.

Avoir les moyens de nos ambitions politiques suppose l’exemplarité, et ce d’abord sur le plan budgétaire. Dès lors, comment prétendre insuffler une nouvelle dynamique à une Union européenne résignée à jouer les seconds rôles ? Sur quelle autorité morale pouvons-nous nous appuyer lorsque nos comptes publics sortent des limites, déjà extensibles, du pacte de stabilité ? Les références à une histoire glorieuse, mais déjà lointaine, sont dépassées, voire contre-productives. La méfiance de nos concitoyens envers l’Europe ne risque pas de s’amenuiser. Il est d’ailleurs symptomatique de constater l’hostilité grandissante à l’égard de la BCE, alors que celle-ci peine de plus en plus à trouver des arguments pour justifier sa politique des taux.

Certes, la BCE confirme son inflexible indépendance face aux politiques, mais il n’est pas hérétique de s’interroger sur la pertinence même de son ancre nominale : est-il définitivement opportun qu’une banque centrale ne poursuive qu’un objectif de stabilité des prix ou bien est-il envisageable de lui assigner, au même rang, un objectif de soutien à l’activité ?

L’engagement du Gouvernement à tenir les critères de stabilité avant 2012 est modérément ambitieux, mais demande néanmoins de réels efforts. La série de mesures structurelles fortes, à l’instar du projet de loi de modernisation de l’économie, a été saluée par le Fonds monétaire international, pour son effet dynamisant.

Enfin, la révision générale des politiques publiques donnera une vision globale de leur efficacité ou de leur inefficacité. Nous en attendons les conclusions définitives avec impatience. Les audits menés par votre prédécesseur au ministère du budget permettent déjà de rationaliser certains postes de dépenses. Mais beaucoup reste à faire, et, disant cela, je pense entre autres à la politique erratique de la gestion immobilière de l’État. Il est tout simplement ubuesque que l’État ne connaisse pas l’étendue de son parc immobilier !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion