Intervention de Nicole Bricq

Réunion du 16 juillet 2008 à 15h00
Modernisation des institutions de la ve république — Article 11

Photo de Nicole BricqNicole Bricq :

Nous avons eu l’occasion, à plusieurs reprises, de discuter de cet amendement sous des formes rédactionnelles différentes. Permettez-moi d’en retracer les étapes, pour que l’on comprenne bien de quoi il s’agit.

D’abord, au Sénat, en première lecture, M. le président de la commission des finances et M. le rapporteur général avaient déposé un amendement qui visait à faire valider en loi de finances et en loi de financement de la sécurité sociale tout dispositif d’exonération fiscale ou sociale.

Le groupe socialiste du Sénat avait déposé un amendement similaire et avait accepté de le retirer, car son objet était commun avec celui du président de la commission des finances.

Ensuite, en seconde lecture, à l’Assemblée nationale, la commission des lois, par la voix de son rapporteur, Jean-Luc Warsmann, a déposé un amendement de suppression de cette initiative sénatoriale qui avait pourtant réuni l’ensemble du Sénat dans un vote clair, arguant du fait que cet amendement méprisait le principe d’égalité des lois donnant une primauté aux lois de finances et de financement de la sécurité sociale par rapport aux lois ordinaires et contraignait, en outre, le Gouvernement si ce dernier ne souhaitait pas attendre une loi de finances pour insérer un dispositif d’exonération.

L’amendement de suppression de M. Warsmann a été adopté.

Puis, la semaine dernière, à l’occasion de l’examen du projet de loi de règlement des comptes pour l’année 2007, est apparu un dispositif complémentaire qui prévoyait que, dans la loi de finances et dans la loi de financement de la sécurité sociale était joint, en annexe, un récapitulatif des dispositions relatives aux règles concernant l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toute nature, adoptées depuis le dépôt du projet de loi de finances ou de financement de la sécurité sociale de l’année précédente.

À cette occasion, nous avons assisté à une bataille juridique entre le rapporteur général du Sénat, qui souhaitait supprimer ce dispositif, et le ministre du budget, qui, quant à lui, souhaitait son maintien.

S’agissant de l’opportunité de maintenir cette disposition compte tenu de son caractère inconstitutionnel, il faut rappeler que le Conseil constitutionnel avait clairement affirmé que seule une loi organique pouvait prévoir la possibilité de joindre des annexes aux lois de finances et aux lois de financement de la sécurité sociale.

Au final, le Sénat a voté l’amendement de suppression du rapporteur général, de sorte que les deux dispositifs de départ, considérés comme complémentaires, ont tous deux disparu.

La commission mixte paritaire se réunira le 22 juillet pour examiner les articles restant en discussion du projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour l’année 2007. En cet instant précis, rien ne prouve que nous puissions combler ce vide à cette occasion.

C’est pourquoi, au nom du groupe socialiste, je défends cet amendement tendant à restaurer la capacité pleine et entière du Parlement à prendre la mesure de toute disposition visant les impositions de toutes natures et l’assiette des cotisations sociales dans les lois de finances et les lois de financement de la sécurité sociale.

Trop souvent, les parlementaires sont mis devant le fait accompli. Ce matin, lors du débat d’orientation budgétaire, nous l’avons unanimement déploré devant le ministre du budget, à propos des dépenses fiscales ou des exonérations sociales. Nous ne voulons pas que les parlementaires en soient réduits à entériner des mesures prises dans le cadre d’autres véhicules législatifs.

Permettez-moi de m’inquiéter de la multiplication des niches fiscales, dont le nombre a augmenté de plus de 20 % ces trois dernières années. Les dépenses fiscales atteignent aujourd’hui 73 milliards d’euros. Face à ce phénomène, nous devons nous doter de règles de bonne gestion publique. Le dispositif proposé dans cet amendement est plus souple que celui que nous avions adopté en première lecture puisqu’il prévoit que les dérogations fiscales ou les exonérations sociales incluses dans une loi votée pourront entrer en vigueur immédiatement ; elles n’auront donc plus besoin d’être validées par une loi de finances ou par une loi de financement de la sécurité sociale pour être appliquées, mais elles devront faire l’objet d’une prorogation par l’une ou l’autre de ces lois.

Ainsi, une confirmation sera requise pour qu’elles puissent continuer à s’appliquer. Ce dispositif permettra, comme tout le monde le souhaite, de faire l’évaluation, au moins a posteriori, de mesures fiscales dont on connaît mal l’impact sur l’équilibre de nos finances publiques.

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