... et ce pour une raison simple, mais je ne suis pas le seul ici de mon âge : on prend inévitablement une certaine distance avec l’évolution des sensibilités contemporaines. Or, selon moi, quand on doit arrêter des décisions de cet ordre, une telle prise de distance n’est pas bonne et, s’agissant d’une fonction à vie, j’ajoute que les capacités intellectuelles peuvent – mais on ne le réalise pas toujours – ne pas demeurer aussi vivaces qu’au moment de la prise de fonctions.
Par conséquent, le mandat à vie est en soi condamnable, de même que la présence à vie des anciens Présidents de la République au sein du Conseil constitutionnel. Je ne parle pas de ceux qui y siègent déjà ; il est hors de question de toucher à leur mandat ; cela n’est pas souhaitable.
Enfin, il n’est pas bon non plus qu’au sein d’une grande juridiction comme celle-là, Conseil ou Cour, une proportion de plus en plus importante de femmes ou d’hommes – pour l’instant, ce ne sont que des hommes –, soit perçue de l’extérieur comme étant inévitablement des personnalités politiques.
La politisation d’une grande institution juridictionnelle est mauvaise. Les Britanniques disent, à juste titre, qu’il ne suffit pas que la justice soit rendue ; encore faut-il que l’on pense qu’elle a été rendue ! Or ce n’est pas le soupçon de politisation des membres du Conseil constitutionnel qui incitera à mieux accueillir les décisions de celui-ci.
Tout y contribue ; c’est d’ailleurs la raison pour laquelle la commission des lois et vous-mêmes aviez voté la suppression du deuxième alinéa de l’article 56 de la Constitution. Je regrette que cette mesure ait été rétablie ; je demande donc à la Haute Assemblée de revenir à sa position première.