En 2004, les négociations sont ouvertes. En 2007, notamment sous la présidence allemande, on engage les négociations sur trois chapitres de cette adhésion et, aujourd’hui, on supprime le verrou référendaire. J’y vois une logique qui va rendre le refus de cette adhésion très improbable et totalement inacceptable par les Turcs, auxquels on demande, de proche en proche, de réaliser d’énormes efforts.
La deuxième raison de mon regret, c’est que l’on accrédite, avec la suppression de ce verrou référendaire, l’idée de la construction d’une Europe a-démocratique. J’ai apprécié l’intervention du Président de la République sur une chaîne de télévision publique, il y a quelques semaines, au cours de laquelle il a dressé ce constat, et je pense que le diagnostic est juste : « Il y a eu erreur dans la façon de construire l’Europe. »
Où est l’erreur ? Que manque-t-il aujourd’hui à l’Europe ? L’assentiment, la raison du cœur, le consentement populaire sont absents. Tout est fait pour tenir systématiquement les peuples à l’écart.
Soit on ne les consulte pas, ce qui est souvent le cas pour les élargissements. Quand a-t-on interrogé les Français sur un élargissement pour la dernière fois ? Il y a bien longtemps ! Or un élargissement définit non seulement un périmètre, un espace, mais aussi un projet : c’est important !
Soit on les consulte : le référendum de 2005, le traité de Lisbonne, ersatz du traité constitutionnel. Mais quand les peuples ne donnent pas la réponse attendue, on cherche à contourner celle-ci, comme pour le vote des Irlandais. Ce n’est pas une bonne manière !
Au fond, que retiendront les Français de cette réforme ? Certainement pas la réforme du 49-3, l’ordre du jour partagé, etc. Ils risquent de ne retenir que la suppression de cette ultime garantie dont ils disposaient. Or il revient au peuple, en dernier ressort, de dire si, oui ou non, il souhaite partager son destin avec tel ou tel autre peuple.
Tel est le sens de cet amendement, qui mérite sans doute un peu d’attention.