Monsieur le secrétaire d'État, avec le ministre d'État, vous êtes, en quelque sorte les ministres du moyen et du long terme. C'est donc une immense responsabilité qui vous a été confiée et l'écume médiatique des jours ne comptera pour rien dans le jugement que portera l'histoire sur le réveil des sociétés modernes face aux défis du développement durable.
Pardon de placer le débat budgétaire relatif à vos fonctions au rang d'une question de principe, mais, au final, que sont les comptes, sinon la traduction de la politique voulue par le pays dans un domaine de cette importance ?
Revenant à mon humble condition de rapporteur spécial, il me semble utile de rappeler, pour éclairer la Haute Assemblée, que les trois missions qui vont faire l'objet d'un intérêt commun sont d'importance très différente, si l'on s'en tient au montant des crédits budgétaires et extrabudgétaires en jeu.
La nouvelle mission « Écologie, développement et aménagement durables » représente 10 milliards d'euros de crédits budgétaires auxquels s'ajoutent 2 milliards d'euros de fonds de concours et 3 milliards d'euros de dépenses fiscales. Le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » s'élève à 1, 9 milliard d'euros. Le compte d'affectation spéciale « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route » représente 204 millions d'euros.
Cependant, ces trois missions ont un point commun, à savoir qu'elles traduisent les orientations nouvelles résultant de la création d'un grand ministère de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, dont la volonté et l'ambition sont de placer le développement durable au centre de la stratégie politique des prochaines années.
À cet égard, nous avons noté que cette nouvelle approche, même si elle relève parfois encore du simple symbole, est déjà sensible dans plusieurs des programmes que nous examinons. Pour vous le prouver, je veux vous citer quelques exemples, mes chers collègues.
D'abord, parmi les anciens programmes de la mission « Transports », le programme 203 « Réseau routier national » place au premier plan l'entretien des infrastructures, avant leur développement, alors que le programme 226 « Transports terrestres et maritimes » s'oriente plus clairement vers le développement des modes complémentaires et alternatifs à la route.
Ensuite, en ce qui concerne le secteur aérien, la Direction générale de l'aviation civile, la DGAC, a fait de l'élaboration d'une politique de développement durable l'une de ses missions stratégiques pour l'année 2008, avec, notamment, la volonté de mettre en oeuvre le plus rapidement possible la directive communautaire qui vise à inclure les émissions de gaz carbonique de l'aviation dans le système européen d'échange de quotas d'émission.
Enfin, le programme 174 « Énergie et matières premières » fait figurer la lutte contre le changement climatique au sein des priorités stratégiques.
Mes chers collègues, la commission des finances se félicite de la priorité ainsi donnée aux enjeux écologiques au sein du projet de budget pour 2008, en particulier de la volonté exprimée par le ministre d'État d'amplifier l'action de rénovation et d'entretien des réseaux routier, ferroviaire ou fluvial.
Comme vous, monsieur le secrétaire d'État, la commission des finances a les yeux rivés sur le durable, le moyen et le long terme, tant l'immédiat impose sa dictature à tous et sur tout. Cependant, elle s'est préoccupée de l'absence de traduction financière et budgétaire des orientations proposées aux termes du Grenelle de l'environnement. Alors que le projet de budget a été élaboré avant le dépôt des conclusions auxquelles il a abouti, l'amplification des reports modaux dans le domaine du transport, notamment sur le réseau ferroviaire, appelle, selon elle, des précisions sur les modalités de leur financement. Monsieur le secrétaire d'État, nous écouterons vos réponses avec grande attention, car elles sont nécessaires.
Si le projet de budget pour 2008 donne lieu à une nouvelle maquette budgétaire issue de la création du ministère d'État, nous sommes très attentifs aux conséquences de cette réorganisation sur la structure administrative des anciens ministères. Des informations parcellaires circulent relatives à des décisions qui seront annoncées, paraît-il, le 15 décembre prochain. Il serait souhaitable, monsieur le secrétaire d'État, que vous nous donniez au moins les grandes lignes de cette réforme, afin que le Parlement ne les découvre pas dans la presse. Ce n'est pas l'idée que nous nous faisons des relations entre l'exécutif et le législatif.
J'en viens aux trois programmes que j'ai eu la charge d'examiner, au nom de la commission des finances.
Le programme 226 « Transports terrestres et maritimes » regroupe les moyens mis en oeuvre pour le transport ferroviaire, fluvial et maritime, ainsi que pour l'intermodalité. Je formulerai trois observations à son sujet.
Malgré l'affichage, pour 2008, d'une réorientation très claire des priorités vers un renforcement de la politique de report modal en contrepoint de la route, la soutenabilité globale du programme nous semble très fragile. J'insiste sur ce point.
Le programme 226 représente 2 milliards d'euros. Ces crédits sont complétés par des montants importants de fonds de concours qui proviennent, pour l'essentiel, de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France, l'AFITF. Ces fonds de concours seront en diminution de 8, 6 % en 2008 par rapport à 2007. Ils restent pourtant indispensables à l'équilibre budgétaire du programme, ce qui explique la grave incertitude qui pèse sur le financement futur de l'AFITF à partir de 2009.
Le point le plus positif du programme réside dans l'effort particulier qui est réalisé pour la remise en état du réseau ferroviaire, si indispensable et si urgent.
Le plan de rénovation 2006-2010 sera respecté en 2008. Il vise notamment à poursuivre la suppression des ralentissements, en priorité sur les lignes les plus empruntées. En conséquence, la subvention de régénération versée à Réseau ferré de France, RFF, est augmentée pour atteindre désormais le niveau prévu par le plan de rénovation. Il y a lieu de s'en réjouir.
La convention de gestion du réseau, qui définit les conditions d'exécution et de rémunération des missions réalisées par la SNCF pour le compte de RFF, est fixée pour la première fois dans un cadre pluriannuel - 2007-2010 - qui donne à RFF et à la SNCF la visibilité nécessaire pour mieux s'organiser, pour gagner en productivité et pour optimiser ainsi les dépenses. C'est un vrai progrès !
Enfin, mes chers collègues, une inquiétude pèse sur l'équilibre de Réseau ferré de France. Le projet de budget prévoit une diminution de 5, 4 % de la contribution aux charges d'infrastructures versée par l'État à RFF, contribution destinée à financer l'entretien du réseau ferroviaire.
Réseau ferré de France est donc amené, mécaniquement, à dégager de nouvelles ressources soit par l'augmentation des péages, soit par la cession de ses biens. Mais les recettes tirées des péages sont affectées par la baisse de la circulation des trains de fret et les perspectives pour 2007 et 2008 du produit des cessions sont moins favorables qu'en 2006.
L'estimation du projet annuel de performances, qui envisage une plus-value de 121 millions d'euros reversée à RFF en 2008, paraît donc bien optimiste. Vous le savez, monsieur le secrétaire d'État, les membres de la commission des finances s'intéressent certes beaucoup aux budgets initiaux, mais plus encore à l'exécution. Nous apprécierons la sincérité de la budgétisation initiale au moment de l'exécution. Mais nous avons confiance en vous, et nous ne saurions vous surprendre en flagrant délit d'insincérité !
Dans le contexte que je viens de rappeler, la dégradation des résultats de RFF risque de se poursuivre en 2008.
Bien que le sujet soit d'importance, je passe rapidement sur le programme 173 « Passifs financiers ferroviaires », qui a pour finalité de contribuer au désendettement des deux établissements publics ferroviaires, RFF et la SNCF.
La première action, « Désendettement de RFF », est dotée de 730 millions d'euros. Ce montant conduit à un apurement de la dette de RFF en 2046 ! Faut-il vous souhaiter, monsieur le secrétaire d'État, d'être encore au banc du Gouvernement à cet horizon ?