Intervention de Gérard Miquel

Réunion du 6 décembre 2007 à 15h00
Loi de finances pour 2008 — Compte spécial : contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route

Photo de Gérard MiquelGérard Miquel, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, dans la répartition qui a été faite des programmes de la mission « Écologie, développement et aménagement durables », il me revient de vous exposer les programmes « Réseau routier national » et « Sécurité routière », ainsi que les deux programmes qui constituent le compte d'affectation spéciale « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route ».

Le programme 203, « Réseau routier national », finance le développement et l'entretien du réseau routier national.

Deux points essentiels sont à souligner pour ce programme, qui est au coeur de l'actualité et des problématiques débattues depuis quelques mois : l'arrêt donné au développement du réseau, d'une part, et les interrogations sur l'avenir de l'AFITF, l'Agence de financement des infrastructures de transport de France, d'autre part.

M. le ministre d'État a proclamé la fin des autoroutes et l'arrêt de l'augmentation de la capacité routière à l'ouverture de la table ronde finale du Grenelle de l'environnement.

L'examen des dotations budgétaires du programme « Réseau routier national » l'avait laissé entendre avant ces déclarations : l'action « Développement des infrastructures routières » ne comporte aucun crédit budgétaire et l'avenir de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France est incertain dès 2009.

Au-delà de la question du développement du réseau se pose pourtant celle de son entretien, qui permet de préserver un patrimoine estimé à 104, 3 milliards d'euros pour le seul réseau national après décentralisation.

Les orientations retenues par le programme 203 connaissent une inflexion notable, avec le passage au premier plan de l'objectif d'entretien du parc, au détriment de l'objectif d'investissement dans les infrastructures nouvelles, qui était encore prioritaire en 2007.

Cette inflexion se traduit dans les dotations budgétaires demandées, qui sont en diminution de 10, 5 % en autorisations d'engagement et de 5, 3 % en crédits de paiement par rapport à la loi de finances initiale de 2007.

Dans le même temps, les fonds de concours qui contribuent au programme, et qui proviennent pour l'essentiel de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France et de la participation des collectivités territoriales dans les contrats État-régions, sont globalement en forte diminution et réorientés vers l'entretien et les équipements de sécurité, conformément aux nouvelles priorités définies pour le programme.

Pourtant, même en ce qui concerne l'entretien et l'exploitation du réseau, qui devraient rester prioritaires, l'État procède à une débudgétisation qui s'amplifie par rapport aux exercices précédents, et fait peser sur l'AFITF une part croissante de la charge financière.

Ainsi, à compter de 2008, le financement de deux programmes sera mis à sa charge : le programme de mise en sécurité des tunnels et le programme SURE de mise en oeuvre des aménagements de sécurité sur l'ensemble d'un itinéraire.

Cette compétence renforcée de l'AFITF n'est pas sans poser avec une très grande acuité la question de son financement futur, compte tenu de l'épuisement, dès 2009, des ressources tirées de la privatisation des sociétés d'autoroutes. Depuis sa création, en effet, plus de la moitié des ressources de l'AFITF sont constituées du versement de 4 milliards d'euros, produit de la cession des sociétés concessionnaires.

En 2008, les recettes de l'Agence devraient s'élever à 2, 1 milliards d'euros, dont 1, 2 milliard en provenance des ventes d'autoroutes. Elles seront en diminution de 3 % par rapport à 2007. Au prix, sans doute, d'un accroissement du solde des engagements non couverts par des crédits de paiements, l'Agence pourra donc continuer sa mission en 2008, mais, dès 2009, les recettes de privatisation des autoroutes auront été épuisées.

Comment, monsieur le secrétaire d'État, compenserez-vous la perte pour l'AFITF de la moitié de ses recettes ? Où pensez-vous trouver le milliard d'euros qui fera défaut ?

Nous savons que la mise en oeuvre d'une taxe kilométrique pour les poids lourds sera nécessairement longue et délicate. Dans la meilleure des hypothèses, une redevance acquittée par les poids lourds sur tout ou partie du réseau routier ne pourrait pas procurer des recettes avant 2010.

S'il se confirme que cette redevance sera compensée aux transporteurs routiers, comment obtiendrez-vous le transfert modal que vous avez tant prôné pendant le Grenelle de l'environnement ?

Je serai beaucoup plus bref sur le programme 207, « Sécurité routière », qui n'appelle pas de longs développements. Ce programme modeste représente 87 millions d'euros en autorisations d'engagement et 99, 8 millions d'euros en crédits de paiement et ses dotations évoluent peu par rapport à la loi de finances initiale de 2007.

Les quatre actions du programme ont été stabilisées après les mouvements importants qui avaient marqué l'exercice 2006.

Certaines des dépenses ont été révisées à la baisse, en fonction des résultats de l'exécution budgétaire. C'est le cas des dépenses de l'action n° 3, « Éducation routière », consacrées au dispositif du permis à un euro par jour.

Ce système, en effet, n'a pas rencontré le succès escompté et vous nous aviez indiqué, monsieur le secrétaire d'État, lors de votre audition par notre commission pour la loi de règlement du budget de 2006, que vous recherchiez des formules différentes à promouvoir, inspirées des expériences des collectivités territoriales. Sur ce point, votre réflexion a, semble-t-il, bien avancé.

Certes, les crédits inscrits au programme 207 ne résument pas l'effort de l'État en faveur de la sécurité routière. Ce dernier est retracé dans un document de politique transversale, « Sécurité routière », qui fait apparaître que dix-sept programmes des différentes missions budgétaires sont concernés par cette action, qui mobilise au total plus de 2 milliards d'euros de crédits dans le projet de loi de finances pour 2008.

J'en viens maintenant à la mission spécifique constituée par le compte d'affectation spéciale « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route ».

Ce compte d'affectation spéciale, qui a été créé par l'article 49 de la loi de finances pour 2006, comporte deux programmes bien distincts qui ne relèvent pas du même ministère : le programme 752, « Fichier national du permis de conduire », et le programme 751, « Radars ».

Je ferai deux observations. La première porte sur le programme « Fichier national du permis de conduire », qui est sous la responsabilité de la secrétaire générale du ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire. Ce programme couvre exclusivement le financement de la gestion du droit à conduire par l'actuel fichier national du permis de conduire ainsi que le financement du développement d'un nouveau système national des permis de conduire, appelé projet FAETON.

Les demandes de crédits pour 2008, soit 12 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, sont en diminution de la moitié par rapport aux crédits inscrits dans la loi de finances initiale pour 2007.

Cette année-là, en effet, avait été ajouté au montant des dépenses de fonctionnement le coût total estimé du projet FAETON de refonte du fichier national du permis de conduire, soit 15 millions d'euros.

Or, ce projet FAETON, qui prévoit notamment des permis au format carte à puce, le renouvellement tous les dix ans du document ou encore le retrait des permis « roses » en circulation entre 2013 et 2032, a pris du retard. Le ministère de l'intérieur n'envisagerait une mise en service progressive qu'à partir de 2010.

Pouvez-vous confirmer ce report, monsieur le secrétaire d'État ? Le coût réel du projet FAETON ne dépassera-t-il pas les 15 millions d'euros qui ont été « thésaurisés » depuis 2007 ?

Par ailleurs, je m'interroge sur les 12 millions d'euros de dépenses de fonctionnement de l'actuel système national des permis de conduire, lesquelles sont constituées, pour l'essentiel, de frais postaux. L'obligation, récemment instituée, d'avertir par lettre recommandée les conducteurs dès qu'ils ont six points de moins sur leur permis a entraîné une forte progression de ces dépenses. De quels moyens disposez-vous pour maîtriser ces coûts ?

Le second programme du compte spécial « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route » est le programme 751 « Radars ». Il ne comprend qu'une seule action, rassemblant les financements de l'ensemble de la chaîne de contrôle et de sanction des infractions au code de la route. Pour 2008, 191, 97 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement lui étaient initialement attribués par le projet de loi de finances.

Lors de l'examen de la première partie, nous avons déjà abordé à l'article 16, très longuement d'ailleurs, le débat sur la répartition du produit des amendes des radars. Je n'y reviendrai pas. Compte tenu du vote intervenu, qui a finalement réduit de 10 millions d'euros les recettes du compte spécial, je vous présenterai simplement, au nom de la commission, un amendement de coordination avec ce vote.

Les crédits prévus pour le programme « Radars » appellent trois observations de ma part.

La première porte sur la forte augmentation des crédits, en hausse de 65, 5 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2007.

Cela doit, certes, permettre de mettre en oeuvre le plan de mise en place des radars automatiques, mais, compte tenu des retards accumulés dans les marchés d'acquisition des radars et de l'évolution entre le nombre de radars fixes et celui de radars mobiles, la commission considère que cette hausse est « surdimensionnée » par rapport aux besoins. C'est d'ailleurs un point que l'examen du projet de loi de règlement du budget 2007 nous permettra d'éclaircir.

La deuxième observation porte sur le périmètre du compte spécial.

Lors de la création de ce compte spécial, les dépenses ont été définies limitativement par l'article 49 de la loi de finances pour 2006 pour correspondre aux « coûts relatifs à la conception, à l'entretien, à la maintenance, à l'exploitation et au développement de systèmes automatiques de contrôle et sanction ».

Or, comme l'a souligné le Comité interministériel d'audit des programmes, le CIAP, dans son rapport de mars 2007, un montant croissant de dépenses sont effectuées par le compte spécial à la marge, voire au-delà de ce périmètre. Il s'agit de dépenses de communication ou d'expérimentation, pour lesquelles les crédits inscrits s'élèvent respectivement à 4 millions d'euros et à 5, 5 millions d'euros. Selon le CIAP, ces dépenses devraient être prises en charge par le programme 207 « Sécurité routière ».

La troisième observation concerne la justification au premier euro du projet annuel de performances, dont je déplore la présentation très confuse.

Celle-ci ne permet ni de comparer l'évolution des montants par rapport aux exercices précédents ni d'identifier avec certitude le coût réel du Centre national de traitement des amendes comme celui de la maintenance du dispositif de radars. Un effort très net doit être accompli pour améliorer la présentation des comptes du programme.

En conclusion, monsieur le secrétaire d'État, la commission des finances, dans sa majorité, a décidé d'approuver ce projet de budget. Néanmoins, vous comprendrez que mon groupe, eu égard aux critiques que je viens de formuler et à celles que mes collègues ne manqueront pas de faire, ne le votera pas.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion