... au détriment du service public.
Cette nouvelle politique d'entreprise justifie le choix du haut débit ferroviaire et la fin programmée du service du wagon isolé, jugé non rentable. Selon les propos mêmes de sa présidente, « la SNCF renonce à l'universalisme de ce service et à la couverture homogène du territoire ».
Nous avons vu quelles conséquences ont découlé, dans le plan fret 2004-2006, de l'application de ces nouvelles priorités : suppression de plus de 7000 postes, fermeture de 100 gares de triage et de nombreuses gares de fret, sans parler de la dégradation des résultats de cette branche d'activité. Mais comment penser augmenter le chiffre d'affaires quand on réduit le réseau au maximum ?
Parallèlement, la mise en oeuvre de ce plan a eu pour conséquence immédiate de mettre sur les routes plus de 1 400 000 camions supplémentaires. Aujourd'hui, nous savons donc pertinemment que si de nouvelles gares de fret sont fermées - je pense là à la fermeture au service du wagon isolé, envisagée au 30 novembre dernier, de 262 gares -, c'est autant de trafic qui se reportera sur la route, mode de transport très polluant qui bénéficie pourtant d'une réglementation fiscale et sociale particulièrement avantageuse.
À l'évidence, lorsque les entreprises ou le Gouvernement en appellent à la notion de compétitivité économique, cela provoque nécessairement de nouveaux reculs pour le développement ferroviaire durable et pour la protection de l'environnement.
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen estiment, pour leur part, que la mise en oeuvre d'une véritable politique des transports permettant l'essor des modes alternatifs à la route conformément aux impératifs environnementaux nécessite une intervention publique importante, dégagée des impératifs économiques de court terme.
Cet objectif suppose des moyens accrus pour les opérateurs publics, outils de la puissance publique.
En ce qui concerne notamment le ferroviaire, celui-ci ne pourra regagner des parts qu'à l'unique condition d'engager une modernisation de ses réseaux et de son matériel et d'offrir aux agents des conditions de travail satisfaisantes.
Dans ce sens, l'école polytechnique de Lausanne a chiffré dans son audit les besoins d'investissement dans les réseaux à 5, 5 milliards d'ici à 2015, ce qui correspond à un effort de 500 millions par an. Pourtant, contre toute attente, les subventions au réseau baissent.
L'aide au désendettement de RFF stagne à 730 millions d'euros, après une baisse de 70 millions depuis 2006.
Pourtant, dans le modèle de développement du ferroviaire allemand, si souvent cité en exemple, l'État a, pour sa part, fait le choix de la reprise intégrale de la dette. Cela devrait tout de même nous conduire à réfléchir !
De plus, par un subtil jeu d'écritures, vous augmentez la subvention de régénération de 80 millions d'euros, mais, parallèlement, vous diminuez de 180 millions d'euros la contribution aux charges d'infrastructures versée à RFF.
Le manque à gagner de 100 millions d'euros a vocation à être comblé par des augmentations de péages, qui, je le précise, ont déjà augmenté de 49 % depuis 2003, et par des cessions immobilières.
Autrement dit, vous continuez la « grande braderie » du patrimoine public et vous renforcez la pression financière, notamment sur la SNCF, qui voit ses charges d'exploitation exploser !
En outre, l'exploitant public investi d'une mission de service public reste pénalisé par le poids de la dette historique. Là encore, la contribution de l'État à cette charge diminue de 30 millions d'euros cette année.
Par ailleurs, la compensation au titre de la politique de mobilité passe de 84 millions d'euros inscrits au budget l'an passé à 74 millions d'euros cette année. Au moment où les Français font les frais d'une perte importante de leur pouvoir d'achat, cette nouvelle coupe leur donne des indications claires sur le sens que donne le Gouvernement à la notion de solidarité.
J'en viens maintenant à la subvention au transport combiné. Celle-ci baisse, c'est un comble, de 2, 5 millions d'euros concernant les autorisations d'engagement pour atteindre péniblement 23, 4 millions d'euros. C'est une aberration quand on sait que ce même gouvernement ne cesse de discourir sur l'exigence du développement durable et de la protection de l'environnement.
Il ne faut pas l'oublier, avant l'arrivée de la droite au pouvoir, la subvention octroyée pour le développement du transport combiné s'élevait à 92 millions d'euros.
Parallèlement, les aides aux transporteurs routiers, notamment grâce aux exonérations fiscales et sociales, sont une nouvelle fois en augmentation. Et je ne parle pas de la généralisation des véhicules de 44 tonnes, qui va accroître la concurrence entre ces deux modes au détriment du rail. Quant à la mise en oeuvre de l'eurovignette, proposition phare du fameux Grenelle de l'environnement, vous la cantonnez au réseau non concédé. De plus, le Gouvernement a déjà annoncé des compensations fiscales en faveur des entreprises du fret routier. Autant dire que, dans ces conditions, l'utilité de cette écotaxe sera très limitée.
Où sont donc passés les engagements forts du Gouvernement en faveur du développement durable qui devaient passer par une réorientation de la politique des transports ? Comment comprendre le choix de la SNCF, outil de la puissance publique, de renoncer à ses missions de service public au nom de la rentabilité ?
Pour couronner le tout, comment ne pas être inquiet pour l'avenir des financements de l'AFITF ? En effet, le reversement à cette agence d'une partie du produit de la vente des concessions d'autoroutes va cesser dès la fin 2008. Selon les indications du ministre de l'écologie, les besoins de financement s'élèvent à 16 milliards d'euros uniquement pour les actions déjà programmées. Comment seront alors financés les engagements pris dans les contrats de projets État-régions 2007-2013 ? Comment sera financé le plan de régénération du réseau ? Comment seront financées les décisions du Grenelle de l'environnement ? Quelles sont les perspectives ouvertes pour le prochain comité interministériel d'aménagement et de compétitivité des territoires, le CIACT ?
Alors que les dividendes des SEMCA auraient dû rapporter sur le long terme des financements importants et pérennes à l'État, le Gouvernement a fait le choix de céder dans la précipitation cette rente au privé.
En outre, comment ne pas être tous inquiets quand vous annoncez, monsieur le secrétaire d'État, à l'Assemblée nationale, lors de l'examen des crédits budgétaires de la politique des territoires, que le recours à l'emprunt ou de nouvelles cessions d'actifs peuvent être considérés comme des pistes pour financer l'AFITF ?
Ces pistes n'étant pas de notre point de vue pertinentes, nous craignons une pression accrue sur les collectivités pour le financement du service public du transport.
Concernant la clef de répartition des investissements réalisés par l'AFTIF, aucun signe n'est réellement donné en faveur du rééquilibrage, puisque 42 % des sommes allouées financeront encore des projets routiers.
Nous sommes donc bien loin de la révolution annoncée à grand renfort de médias lors du Grenelle de l'environnement.
Puisque nous sommes dans la continuité de l'action menée par la droite au pouvoir depuis 2002, dont les objectifs sont l'austérité budgétaire et la mise en oeuvre de la libéralisation du secteur des transports, nous voterons contre les crédits du programme « Transports terrestres et maritimes », qui ne répondent nullement aux enjeux du développement durable et de la protection de l'environnement.