Intervention de Denis Detcheverry

Réunion du 30 octobre 2006 à 15h00
Dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer — Discussion d'un projet de loi organique et d'un projet de loi déclarés d'urgence

Photo de Denis DetcheverryDenis Detcheverry :

... mais placé aux portes de la plus grande puissance économique, je veux dire le continent nord-américain. Les élus de Saint-Pierre-et-Miquelon, à l'unanimité, sont convaincus de la possibilité d'une reconversion économique de l'archipel. L'évolution statutaire devrait nous permettre une meilleure intégration régionale.

Je pense que les élus de l'archipel sont généralement les mieux placés pour comprendre, expliquer et mettre en valeur les spécificités de leur région, spécificités bien souvent considérées comme des handicaps par le passé, alors qu'elles peuvent constituer de réels atouts, pourvu que l'on s'autorise à sortir des sentiers battus.

Le projet de loi organique prévoit d'accorder à la collectivité de Saint-Pierre-et-Miquelon les mêmes compétences qu'aux départements et aux régions d'outre-mer en matière de coopération décentralisée et dans le domaine des relations extérieures, ce qui est, à mon sens, une très bonne chose.

Je pense notamment à cette nouvelle forme de coopération régionale que vous avez bien voulu mettre en place, monsieur le ministre, en organisant les rencontres d'Ottawa au début du mois. Ces rencontres ont mis en évidence la technicité et le pragmatisme qui nous ont tant fait défaut par le passé. Elles nous ont également prouvé, compte tenu de la qualité des échanges que nous avons eus, que le Canada était ouvert au dialogue, qu'il s'agisse de la zone économique exclusive ou de l'exploration et de l'exploitation des hydrocarbures. Je ne puis que me réjouir de cette nouvelle méthode, l'ayant moi-même appelée de mes voeux à plusieurs reprises devant vous, monsieur le ministre.

Cet accompagnement aura pour effet de nous aider à mieux définir une politique économique durable, de responsabiliser les élus par une certaine forme d'autonomie, dans le respect des valeurs et des intérêts de la France. Je parle bien d'une « forme d'autonomie » : vous l'aurez remarqué, monsieur le ministre, il n'est aucunement question d'indépendance dans mon propos. L'implantation définitive, en 1816, du drapeau tricolore sur nos îles de l'Atlantique Nord a été très durement gagnée par nos ancêtres ; elle perdurera.

Bien entendu, monsieur le ministre, ces évolutions seraient impossibles sans un accompagnement financier du Gouvernement. Cet accompagnement doit faire l'objet d'un véritable plan d'action, ainsi que d'une programmation, puisqu'il doit permettre, à terme, un véritable développement économique de notre collectivité, donc une moindre dépendance par rapport à cet assistanat que j'évoquais tout à l'heure. Cet accompagnement doit aussi tenir compte des aides dont nous ne bénéficions pas, du fait, une fois de plus, de notre statut spécifique : c'est, là aussi, le revers de la médaille.

Ainsi, nous sommes en décalage s'agissant de la dotation globale de fonctionnement. Le retard à rattraper est encore important. Par ailleurs, le fait que nous relevons du statut des pays et territoires d'outre-mer nous prive de l'accès aux fonds structurels européens. C'est regrettable, car ce sont bien souvent les petites collectivités qui ont le plus besoin d'un soutien.

Autre exemple : à Saint-Pierre-et-Miquelon, nous n'avons pas accès aux aides prévues par la loi Chevènement pour encourager l'intercommunalité. En effet, le contexte géographique particulier de notre archipel ne nous permet pas de mettre en place certaines mesures exigées pour répondre aux critères précis de ces aides. Il est nécessaire que le manque à gagner soit quantifié et qu'une dotation de compensation soit envisagée dans un avenir proche.

Pour revenir au projet de loi organique, d'autres mesures concernent le fonctionnement de la collectivité territoriale, à l'image des conseils généraux et régionaux, et les relations avec les deux communes. En accord avec Mme Brigitte Girardin, qui était chargée de l'outre-mer à l'époque, et avec la délégation du Sénat dont vous faisiez partie, monsieur le rapporteur, il a été décidé d'introduire, par voie d'amendement et après consultation de la population, un transfert de compétence aux communes en matière d'urbanisme. En tant que maire de Miquelon-Langlade, j'en suis très heureux, car cela signifie un peu plus d'autonomie pour les communes, à l'image de ce qui se fait en métropole.

Sur le même principe, un amendement de la commission des lois fera de Saint-Pierre-et-Miquelon une circonscription unique où Saint-Pierrais et Miquelonnais voteront pour les mêmes équipes, ce qui n'était pas le cas. Jusqu'à ce jour, en effet, les électeurs de Saint-Pierre votaient pour leurs représentants, séparément de ceux de Miquelon, qui votaient pour les leurs. Cet amendement dénote une volonté d'union des deux îles.

Le principe de sections de liste, comme pour les élections régionales, garantira la représentation des deux communes au sein du conseil général, désormais dénommé conseil territorial, Saint-Pierrais et Miquelonnais se retrouvant dans la même majorité. Si la prime majoritaire du tiers des sièges et le seuil de 10 % des suffrages exprimés sont retenus, je crois que nous aurons réussi à conjuguer stabilité et efficacité, tout en laissant une place légitime à l'opposition, dans laquelle nous risquons tous de nous retrouver un jour ou un autre !

Voilà les grandes lignes du projet de loi organique concernant Saint-Pierre-et-Miquelon.

Je tiens à vous remercier, monsieur le ministre, d'avoir permis à ce texte d'exister. Je remercie également le président de la commission des lois, le rapporteur et les membres de la commission, ainsi que nos collaborateurs, sans oublier les conseillers du groupe, pour leur efficacité et leur objectivité. Ils ont tous beaucoup travaillé, et ce en bonne intelligence.

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