Monsieur le président, afin de respecter une certaine logique et si vous le permettez, je présenterai également l’amendement n° 494.
L’Assemblée nationale a introduit une disposition visant à créer une commission scientifique internationale sur l’Arctique, prenant très justement en considération le rôle central de cette région sur le climat de la planète.
Or la création d’une telle commission ne me semble pas nécessaire puisqu’il existe d’ores et déjà, auprès du Conseil de l’Arctique, une commission scientifique internationale de l’Arctique.
Il reste que la coordination des travaux scientifiques menés dans l’Arctique doit encore être améliorée. En 2006, l’académie des sciences des États-Unis a été à l’initiative du projet d’un observatoire scientifique international et multidisciplinaire de l’Arctique pour pallier, notamment, les insuffisances scientifiques et opérationnelles des dispositifs existants.
À l’échelon du Conseil de l’arctique, un groupe de préfiguration a été créé à la fin de l’année 2006 et a rendu ses recommandations en faveur du projet précité au mois d’octobre 2008. Au mois de juillet dernier, après une mission dans l’archipel du Svalbard, situé dans l’Arctique, j’ai été nommé auprès de Mme la ministre de la recherche pour travailler avec la communauté scientifique polaire française sur ce sujet.
Le ministère de la recherche a récemment désigné le CNRS comme chef de file national pour fédérer la communauté scientifique française dans ce cadre, à la suite du rapport que j’ai présenté au début du mois de novembre.
Compte tenu de l’ensemble de ces initiatives et de l’engagement formulé lors du Grenelle de l’environnement, le Gouvernement a organisé à Monaco, les 9 et 10 novembre derniers, la conférence internationale sur l’Arctique, dans le cadre de la présidence française de l’Union européenne, notamment pour que nos partenaires se mobilisent sur ce projet. Monsieur le ministre d’État, vous présidiez cette conférence en tant que représentant la présidence française de l’Union européenne. C’est avec un grand honneur que je vous ai accompagné à cette conférence.
C’est pourquoi il paraît à la fois conforme aux engagements du Grenelle de l’environnement, au droit international et à l’action de notre pays dans le cadre de la présidence française de l’Union française de retenir la volonté de la France de contribuer à la création, non pas d’une commission scientifique internationale, puisqu’une telle instance existe déjà, mais d’un observatoire scientifique international.
Cependant, le remplacement de la commission par un observatoire n’est pour moi qu’une première étape. C’est pourquoi je propose, avec l’amendement n° 494, que, dans l’esprit du Grenelle de l’environnement, la France participe à l’adaptation de la réglementation internationale aux nouveaux usages de l’Arctique rendus possible par l’accessibilité croissante de cet océan.
En effet, l’engagement n° 230 du Grenelle de l’environnement prévoit l’« initiation d’un traité de l’Arctique pendant la présidence française ». Cette formulation semble reposer sur deux idées : d'une part, l’Arctique ne serait régi par aucun texte international ; d'autre part, il serait souhaitable d’élaborer un traité général, à l’instar du traité de Washington, mis en place en 1959 pour le continent antarctique.
En fait, l’Arctique fait d'ores et déjà l’objet d’une réglementation internationale : à la différence de l’Antarctique qui, comme vous le savez, est un continent, l’océan Arctique se trouve régi, comme toutes les mers du globe, par la convention sur le droit de la mer de Montego Bay, signée en 1982.
Cette région s’inscrit même dans un cadre particulier, puisqu’il s'agit d’une mer semi-fermée, relevant de la partie IX de ladite convention. Le Conseil de l’Arctique, qui réunit les États riverains – la France y est, à l’instar de plusieurs autres pays européens, observateur – est donc compétent sur ces questions.
C’est dans ce cadre qu’un important accord, la convention OSPAR de 1992 pour la protection de l’environnement de l’Atlantique du nord-est, dont le nom résulte de la contraction de « Oslo et Paris », protège déjà environ 25 % de l’océan Arctique.
Par ailleurs, il faut garder à l’esprit, notamment au regard du débat qui s’est déroulé à l’Assemblée nationale lors de la première lecture de ce projet de loi, que les droits des États riverains de l’Arctique, dans la définition de leur mer territoriale et de leur zone économique exclusive, sont régis par la convention de Montego Bay et reconnus, sans contestation possible et sans exception, par l’ensemble de la communauté internationale.
Cela dit, la disparition progressive de la banquise estivale s’accélère et permet des activités qui n’étaient pas possibles il y a seulement quelques années.
Les progrès technologiques aidant, l’exploitation de l’Arctique devient envisageable. Elle constitue autant une opportunité de développement pour ses habitants, comme le montre le cas du Groenland, qu’un danger pour l’environnement.
Ainsi, dans l’immédiat, c’est non pas un traité – la convention de Montego Bay régit déjà spécifiquement la navigation dans les zones recouvertes par les glaces –, mais un faisceau d’accords internationaux qui est nécessaire afin d’assurer la gouvernance adaptée et, in fine, la protection de l’espace arctique. La volonté exprimée par l’engagement n° 230 du Grenelle serait ainsi pleinement traduite.
Tel est l’objet de cet amendement : faire en sorte que la France s’engage à promouvoir ou à accompagner l’adaptation de la réglementation internationale rendue nécessaire par la disparition progressive de la banquise.
Au demeurant, me semble-t-il, au sein de la sphère des relations internationales, on ne comprendrait pas que la France n’inscrive pas cette volonté dans un texte aussi fondateur que le présent projet de loi.