Intervention de Gaston Flosse

Réunion du 31 mai 2011 à 14h30
Fonctionnement des institutions de la polynésie française — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi organique dans le texte de la commission

Photo de Gaston FlosseGaston Flosse :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la loi constitutionnelle du 28 mars 2003 a transformé les anciens territoires d’outre-mer en collectivités d’outre-mer et a ainsi permis que la Polynésie française bénéficie de ce régime d’autonomie prévu à l’article 74 de notre loi fondamentale.

Cette mutation, qui a été effectuée par la loi organique du 27 février 2004 portant statut d’autonomie de la Polynésie française, est intervenue vingt ans après l’instauration de la véritable autonomie, consacrée en 1984.

Avec ce nouveau statut de collectivité d’outre-mer, le Parlement, accordant sa confiance à la Polynésie française, a permis que notre autonomie fasse un bond considérable. De nouvelles compétences nous ont été accordées. De même, notre assemblée peut désormais adopter des lois du pays. Mieux, le Parlement accepte de faire accéder la Polynésie française à l’exercice de compétences régaliennes, comme la procédure pénale ou la protection de l’emploi local...

Malheureusement, force est de le constater, les gouvernements qui se sont succédé à la tête du pays depuis 2004 ont été incapables de mettre à profit cet outil extraordinaire au service de notre développement économique, social et environnemental. Ils ont été incapables de sortir notre pays de la crise.

Bien au contraire ! Sept ans après, la Polynésie est en état de cessation de paiement. On oblige le gouvernement à vendre nos biens, les entreprises font faillite, des milliers de travailleurs ont été licenciés et la grande pauvreté s’est installée en Polynésie !

Sur le plan politique, la situation est désespérée. Le mode de scrutin retenu n’a pas permis de dégager une forte majorité à l’assemblée. Au contraire, c’est l’instabilité institutionnelle qui a prévalu et qui persiste.

Le Gouvernement a donc décidé de modifier le mode de scrutin par la loi du 7 décembre 2007. Le nouveau mode de scrutin, imposé par M. Estrosi, a encore aggravé l’instabilité institutionnelle, puisque les gouvernements n’ont cessé d’être renversés. Le gouvernement actuel est le neuvième en sept années. Comment un pays pourrait-il progresser dans ces conditions ?

À ce sujet, permettez-moi de vous préciser que M. Estrosi n’a pas tenu compte du vœu émis à l’époque par la très grande majorité des formations politiques représentées à l’assemblée, et que nous n’aurions sans doute pas connu une telle situation s’il avait été davantage à notre écoute.

Aujourd’hui, nous allons à nouveau adopter un mode de scrutin, et il faut remercier le rapporteur, M. Christian Cointat, qui nous propose un mode de scrutin plus conforme aux vœux émis à l’unanimité par les formations politiques polynésiennes.

Toutefois, certains ajustements sont encore indispensables, et je compte vous persuader de la nécessité de procéder à de telles modifications.

Tout d’abord, toutes les formations politiques représentées à l’assemblée sont d’accord pour que la Polynésie française ne forme qu’une seule circonscription, divisée en sections.

Tout le monde s’accorde également sur la nécessité d’introduire une prime majoritaire qui se calcule à l’échelle de l’ensemble de la Polynésie française et non pas à celle de chaque section. Toutefois, c’est à l’unanimité que les représentants vous proposent l’introduction d’une prime de 25 % du nombre des élus à l’assemblée, soit quinze sur cinquante-sept, au lieu de 33 %, soit dix-neuf sur cinquante-sept.

En effet, s’il est certain que notre pays a besoin d’une majorité stable et forte à l’assemblée, il est clair aussi que l’opposition ne doit pas être réduite à quelques élus. Le contrôle et la critique des actions du gouvernement sont une nécessité en démocratie, et ce débat doit avoir lieu à l’assemblée.

Ensuite, le découpage des sections qui nous est soumis pour les îles du Vent aboutit à de fortes disproportions : 66 602 personnes pour la première section, contre 72 901 pour la deuxième et 55 180 pour la troisième !

Pour ces raisons, je vous propose un découpage des îles du Vent en quatre sections d’égale importance : première section, 42 557 personnes ; deuxième section, 55 180 personnes ; troisième section, 47 092 personnes ; quatrième section, 49 854 personnes.

Ce découpage des îles du Vent en quatre sections présente le grand avantage de rendre la taille des sections plus homogène et plus égale entre les sections des îles du Vent et la section des îles sous le Vent, cette dernière ne comportant que 33 165 personnes.

Par ailleurs, ce découpage de l’ancienne circonscription des îles du Vent en quatre sections suscitera immanquablement de nouvelles vocations parmi les hommes et les femmes, plus particulièrement parmi les maires bien implantés dans ces nouveaux terroirs.

Enfin, ce découpage permettra, comme vous le souhaitez, madame la ministre, un renouvellement de la classe politique. Ainsi, ce nouveau mode de scrutin, la constitution d’une circonscription unique comprenant neuf sections, la prime attribuée à la liste ayant obtenu la majorité des suffrages sur l’ensemble de la Polynésie française et le seuil des 10 % des suffrages exprimés pour qu’une liste puisse se maintenir au second tour seront des conditions qui, si elles sont retenues dans la loi définitive, nous feront atteindre notre objectif, c’est-à-dire un retour à la stabilité.

La formation qui gagnera les élections disposera d’une majorité assez forte pour lui assurer la stabilité et pour donner au président qu’elle élira la capacité d’inscrire son action dans la durée, ce que la Polynésie n’a pas connu depuis sept ans.

C’est pourquoi, chers collègues, je vous invite à reconnaître que ces nouvelles règles électorales doivent s’appliquer sans attendre. En effet, aujourd’hui, le gouvernement de M. Oscar Temaru ne dispose plus de la majorité à l’assemblée de la Polynésie française et l’instabilité nous guette de nouveau.

Ne serait-il pas incohérent de constater que le système actuel ne permet pas la stabilité, ne serait-il pas illogique de faire voter une loi par le Parlement pour y remédier tout en différant son application de deux années ? Soyons lucides, soyons crédibles : si nous proclamons que cette loi est bonne, il faut l’appliquer immédiatement ! Comment justifier d’attendre jusqu’à 2013 alors que nous savons que la situation économique et financière de notre pays est au plus bas ? Jamais nous n’avons connu un tel désastre. Cette situation continuera à se dégrader, et plus rapidement qu’on ne le pense !

Chers collègues, nous devons agir. Décidons l’abréviation du mandat de l’assemblée de la Polynésie française, rendons la parole au peuple polynésien, n’attendons pas que celui-ci descende dans la rue. Faisons-lui confiance !

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