Quoi qu'il en soit, monsieur le ministre, vous qui êtes aussi d’un département où l’agriculture occupe une place importante, vous savez évidemment, non seulement qu’il s’agit d’un secteur fondamental dans l’économie française, mais qu’elle est aussi au cœur d’une vision de la ruralité que nous partageons tous, me semble-t-il : nul ici ne peut imaginer un espace rural sans agriculteurs, et plus précisément sans exploitations familiales, à dimension humaine. Voilà pourquoi nous pensons qu’il faut absolument que ces exploitations puissent vivre : ce sont très largement elles qui font vivre les territoires sur lesquels elles sont implantées, qui font vivre notre ruralité.
Pourquoi une telle crise en 2009 ? En fait, elle n’aurait pas été possible avant les réformes de la PAC de 2003 et de 2006. En effet, les mécanismes de régulation auraient pallié les effets conjoncturels qui l’ont déclenchée et qui sont, pour l’essentiel, les suivants : d’abord, la flambée des cours des matières premières, car les fonds spéculatifs investissent massivement dans les produits laitiers industriels et dans le blé ; ensuite, les sécheresses simultanées en Australie, en Nouvelle-Zélande, notamment ; enfin, le retournement brutal des marchés à la suite de la crise financière.
Avant ces réformes, les mécanismes de régulation auraient consisté à déclencher l’achat au prix d’intervention, à soutenir les exportations en permettant les dégagements de marché de poudre et de beurre, et enfin, à organiser le marché grâce au recours aux quotas.
Or les réformes de la PAC ont visé, sur un fondement que je n’hésiterai pas à qualifier d’idéologique, à augmenter les quotas, ce qui revient à en supprimer l’effet, et nous croyons pouvoir penser que cette augmentation prélude à leur suppression, ainsi qu’à celle du prix d’intervention et des restitutions aux exportations.
Résultat : au plus fort d’une crise conjoncturelle, l’équilibre fragile de toute une filière se mue en une hécatombe économique et sociale. Vous n’ignorez pas les situations dramatiques vécues par de nombreuses familles dont les exploitations ne trouvent pas preneur de leur collecte de lait.
J’ai participé, voilà quinze jours, au comice agricole qui se tenait dans une commune de département, Savigny-sur-Braye, dans le Perche. Les agriculteurs et les producteurs laitiers ont tenu à y mener leur bétail et à participer à cette fête – car les comices agricoles sont des fêtes !