Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le 3 octobre dernier, la Commission européenne a lancé une initiative forte en soumettant au Conseil et au Parlement européen une proposition de directive relative à la sécurité et à la santé au travail des femmes enceintes.
Plusieurs avancées sont à relever. Le principe de l’interdiction de licenciement des femmes enceintes est enfin posé au niveau européen, tout comme le droit pour une femme enceinte de bénéficier de l’ensemble des avantages accordés à ses collègues pendant son absence. La possibilité de demander une modification des horaires et rythmes de travail est également acquise. Cependant, il faudra veiller à faire en sorte que cette disposition englobe le travail de nuit, afin que toute salariée enceinte ou ayant accouché puisse être affectée sur un poste de jour sans diminution de salaire.
Mais le texte manque cruellement d’ambition sur d’autres points.
C’est tout d’abord le cas s’agissant de la durée du congé de maternité. Pour certains États, dix-huit semaines peuvent constituer une avancée. Mais faut-il rappeler que l’Organisation internationale du travail en recommande vingt et que l’Organisation mondiale de la santé, l’OMS, et l’UNICEF en préconisent vingt-quatre ?
En outre, les États membres pourront décider de critères d’éligibilité au congé maternité. Mais si ces derniers sont trop restrictifs, ils pourraient limiter le champ des bénéficiaires et la mobilité des travailleurs. Nous devons faire preuve de vigilance sur ce point.
Par ailleurs, si le principe d’une rémunération équivalente au salaire perçu avant le congé est posé par la directive, il n’a pas un caractère obligatoire et risque ainsi de rester lettre morte dans nombre d’États. De plus, la possibilité ouverte de rémunérer le congé maternité à hauteur du congé maladie assimile une femme enceinte à une femme malade. Cette ambiguïté doit être levée, madame la ministre.
Enfin, le texte fait l’impasse sur certains aspects essentiels, notamment le rôle des pères. À cet égard, certains pays sont exemplaires. C’est le cas de la Suède, où les couples peuvent partager seize mois de congé de parenté. Ne pensez-vous pas que l’Union européenne doive proposer un dispositif approchant pour encourager le partage de l’éducation des enfants ? C’est essentiel pour atteindre une réelle égalité professionnelle.
La directive ne comporte rien non plus en faveur des femmes exerçant des professions non salariées – je pense notamment aux femmes chefs d’entreprise ou artisans –, qui sont trop souvent contraintes de reprendre rapidement leur travail.
En définitive, cette proposition n’apportera pas d’avancées significatives aux femmes françaises. Elle pourrait même constituer une régression s’agissant du congé prénatal. En effet, selon l’exposé des motifs, les États membres n’auraient plus la possibilité de l’imposer aux femmes enceintes. Ce congé relèverait alors du libre choix des femmes. Madame la secrétaire d’État, nous souhaitons connaître précisément la position du Gouvernement sur ce point.
Plus généralement, nous aimerions savoir quelles améliorations le Gouvernement proposera sur les points évoqués concernant cette directive, afin que cette dernière ne soit pas seulement une action a minima menée par la Commission européenne.