Je comprends l’intention des auteurs de ces amendements.
Cela étant dit, et pour rassurer certains de nos collègues, je crois que c’est la date de la demande qui compte, et non le fait que le dossier soit complet. Une personne qui déposerait un dossier sans avoir tous les documents nécessaires ne serait pas pénalisée.
Il n’est pas tout à fait illogique qu’une aide sociale soit versée à compter du jour de sa demande. D’ailleurs, les minima sociaux, qui s’adressent souvent à des catégories encore moins favorisées que celles qui nous occupent en ce moment, sont également octroyés à la date de la demande, et non de façon rétroactive, et ce même si les conditions pour en bénéficier sont remplies antérieurement à cette demande.
Je rappelle également que l’article 54 du projet de loi, que la commission n’a pas souhaité modifier, ne change aucunement le montant des aides au logement, que celles-ci soient accordées au titre de la Caisse nationale des allocations familiales ou au titre de l’État, qui sont les deux types d’aides concernées. Les allocataires conserveront donc exactement les mêmes droits, la difficulté se limitant à la rétroactivité de trois mois.
Parmi les CAF que nous avons visitées, une seule a été assez performante et réactive pour nous fournir quelques informations. S’il est bien sûr difficile d’extrapoler à partir d’un seul exemple, je précise qu’il s’agit de la CAF de Rennes : elle couvre un territoire accueillant une grande ville en son centre et une population qui ne me semble pas trop différente de l’ensemble de la population française.
Les informations qui nous ont été remises sont donc assez instructives et démontrent que, en général, les retards de dossier ne concernent pas les personnes les plus vulnérables. Celles-ci étant, heureusement, suivies par les services sociaux et les associations, elles déposent le plus souvent leur dossier en temps et en heure.
Dans le cas de Rennes, si l’on se fonde sur les dossiers antérieurs, et non sur les dossiers à venir, on constate que 20 % des allocataires seraient potentiellement pénalisés. Il s’agit essentiellement de personnes seules, pour une bonne part des étudiants.
Toutefois, on peut supposer – c’est là, peut-être, que l’objectif du Gouvernement ne sera pas rempli … – que ces étudiants seront suffisamment informés de cette nouvelle réglementation par les universités, les institutions dans lesquelles ils s’inscrivent, leurs organisations représentatives, mais aussi les CAF, dont la mission est d’informer les allocataires actuels ou futurs, pour que la mesure ne soit pas aussi opérante que prévu.
À cet égard, je suis même plutôt d’accord avec Mme Claire-Lise Campion quand elle estime que l’économie réalisée sera, à terme, surestimée. Certaines personnes rencontreront peut-être des difficultés la première année, mais, par la suite, seuls les distraits seront victimes de cette disposition, qui, sur le plan technique, est justifiée.
Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis défavorable.