Par cet amendement, les sénatrices et sénateur écologistes demandent la suppression de la deuxième phrase de l’alinéa 6 de l’article 2 aux termes de laquelle la présentation du gardé à vue au procureur de la République, dans l’hypothèse d’une prolongation de la mesure de garde à vue, pourra être réalisée au moyen d’une télécommunication audiovisuelle.
L’instauration de cette possibilité est très inquiétante à nos yeux. En effet, cette mesure fera perdre toute sa substance au principe de présentation du gardé à vue.
Chaque avancée du projet de loi est mise à mal par des exceptions ou des conditions qui en suppriment immédiatement les effets vertueux. C’est de nouveau le cas ici.
La présentation du gardé à vue au procureur de la République pourra donc, d’après les dispositions de la deuxième phrase de l’alinéa 6 de l’article 2, avoir lieu de manière virtuelle. Cette substitution de la visioconférence à une présentation effective constitue une limitation des droits du gardé à vue, qui doit être entendu dans l’hypothèse d’un renouvellement de la mesure de garde à vue.
L’effectivité de la présentation à un magistrat est un élément essentiel d’une procédure équitable, d’autant qu’il s’agit dans ce cas de statuer sur le renouvellement de la garde à vue. Durant cet entretien, le magistrat devrait donc avoir l’occasion de constater de visu l’état physique ou psychologique de l’individu dont il s’apprête à prolonger la garde à vue, cette mesure privative de liberté, pour vingt-quatre longues heures supplémentaires.
La procédure de présentation, déjà mise à mal par la possibilité d’y déroger, dont il sera question dans notre prochain amendement, perdra avec cet entretien virtuel tout ce qui lui reste de substance. De surcroît, l’entretien ne se fera plus dans un lieu neutre, mais dans un milieu carcéral, sous le regard des policiers, ce qui affectera sans nul doute la liberté de parole du gardé à vue. Cette technique de présentation est révélatrice de la mise à l’écart de l’autorité judiciaire dans le cadre de la procédure de garde à vue.
C’est sans doute la réduction constante des budgets alloués au personnel de justice qui pousse aujourd’hui le Gouvernement à souhaiter une généralisation de la vidéoconférence, mais la justice ne peut se rendre de manière effective à travers un écran.
Le recours ici à la vidéoconférence est à l’image du peu de cas que l’on fait des garanties procédurales du justiciable. La présentation effective à un magistrat indépendant du gardé à vue n’est pas consacrée par ce texte.
Ces dispositions adoptées à la hâte ne sont en aucun cas une avancée vers une procédure plus équitable. C’est pourquoi je vous invite, mes chers collègues, à voter cet amendement.