Nous pourrions penser qu’aujourd’hui le respect des droits les plus basiques, tels que ceux de la défense, ou tout simplement le respect de la dignité humaine, inscrits par ailleurs dans la Constitution, étaient chose acquise.
Nous nous demandons pourquoi l’on nous présente aujourd’hui la présence de l’avocat comme étant « révolutionnaire »... C’est un peu exagéré !
La règle communautaire du droit à un procès équitable, inscrite à l’article 6, paragraphe 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, et à partir de laquelle la jurisprudence communautaire a déduit un certain nombre de principes de droit visant à garantir l’équité de la procédure, implique de toute évidence le droit d’être assisté par un avocat.
Ainsi, dans l’arrêt Dayanan contre Turquie, la Cour européenne des droits de l’homme souligne que « l’équité de la procédure requiert que l’accusé puisse obtenir toute la vaste gamme d’interventions qui sont propres au conseil. À cet égard, la discussion de l’affaire, l’organisation de la défense, la recherche des preuves favorables à l’accusé, la préparation des interrogatoires, le soutien de l’accusé en détresse et le contrôle des conditions de détention sont des éléments fondamentaux de la défense que l’avocat doit librement exercer ». Autrement dit, le travail de l’avocat doit se faire dans des conditions qui lui permettent de véritablement préparer sa défense et de préparer les interrogatoires avec la personne gardée à vue.
On est, aujourd’hui, bien loin du compte.
Nous n’avons de cesse de répéter que le texte du Gouvernement reste bien en deçà de ce qu’il devrait être pour garantir le droit à une assistance effective, telle que la souhaitaient le Conseil constitutionnel et la Cour de cassation. Dans l’arrêt Sahraoui rendu par la Cour de cassation, le juge effectue une distinction claire entre la présence de l’avocat et l’assistance de l’avocat en statuant sur la base de l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Vous en faites, pour votre part, une interprétation restrictive !
En tout état de cause, le texte aurait dû être modifié afin de garantir à la personne gardée à vue, pendant la durée entière de la mesure, le droit à l’assistance effective d’un avocat, qui comprend le droit de s’entretenir en privé, la présence aux auditions avec la possibilité de poser des questions et la possibilité d’avoir accès aux pièces du dossier au fur et à mesure de sa constitution.
Comme l’a rappelé la Commission nationale consultative des droits de l’homme, la CNCDH, dans son avis rendu le 6 janvier 2011 sur ce projet de loi, l’avocat est plus souvent un vecteur d’apaisement et de sérénité, à condition qu’il ne soit pas cantonné à un rôle de surveillant privé de réels moyens de jouer son rôle primordial dans la garantie des droits de la défense !
Il convient également d’appréhender les besoins des barreaux, qui ne disposent ni des délais ni des subsides nécessaires à leur réorganisation à court terme. Rappelons également que, selon la CNCDH, pour que le droit à l’assistance d’un avocat en garde à vue soit effectif, les crédits alloués à l’aide juridictionnelle doivent être impérativement augmentés. Or les crédits alloués au service public de la justice ne cessent de s’amenuiser – nous avons d’ailleurs eu l’occasion d’en discuter lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2011 – et sont réduits à une portion congrue.
Somme toute, l’impact de cette réforme sera très limité puisqu’elle ne prévoit pas les garanties inhérentes à l’exercice de ce droit à l’assistance effective d’un avocat. Les dispositions prévues à cet article ne sont que des expédients destinés à répondre aux injonctions européennes. Hélas, ces dispositions promettent, encore, un contentieux à venir.