Vous avez parlé tout à l’heure de générosité, mais on ne donne pas ses gamètes comme on donne du sang. On a besoin de sang pour vivre, mais on a besoin de gamètes pour naître, ce qui ne revient pas du tout au même.
Le don doit être assumé et relationnel. C’est ce qui se passe déjà en Suède, en Angleterre, en Allemagne, en Suisse, en Australie et dans bien d’autres pays. Alors même que certains agitent le chiffon rouge lorsque l’on évoque la levée de l’anonymat, je tiens à rétablir la vérité : non, le nombre de donneurs ne chute pas dans ce nouveau cadre et, s’il peut baisser dans un premier temps, il remonte ensuite.
Ce sont les profils des donneurs qui, sans conteste, changent. Dans les pays où les dons ne sont plus ou n’ont jamais été anonymes, les donneurs sont responsables, citoyens et tout aussi généreux. La différence, c’est qu’ils assument leur altruisme.
Dans le système tel qu’il existe en France, le don de gamètes ne s’adresse qu’aux parents ; même la générosité des donneurs est tenue secrète.
Ce sont tous ces tabous qu’il nous faut lever : le tabou qui pèse sur un couple confronté à l’infertilité de l’un des partenaires ; sur un donneur confronté aux conséquences de son acte ; sur un être qui possède plusieurs parents et qui choisit ou non de les aimer ou de les accepter.
Il est impossible de nier la revendication naturelle d’un citoyen à connaître ses origines, en pensant qu’un être humain peut se contenter d’une demi-vérité. Cela reviendrait à se construire à partir d’un puzzle incomplet. Une seule pièce manquante suffit à amputer le paysage, à rompre l’équilibre.
Oui, les enfants nés par dons de gamètes deviennent des adultes multiples, pluriels. Que l’on respecte leur héritage et, surtout, qu’on ne les en prive pas ! Les ravages et les souffrances liés au secret des origines durent toute une vie. Si nous défendons la liberté et l’égalité de chacun, nous ne pouvons pas tolérer que des êtres humains soient volontairement privés de leur histoire, de leur vérité.
Il faut questionner notre conscience, en plaçant l’enfant au cœur de nos débats. Son intérêt doit primer toute autre considération.