Oui, le don d’organes doit être encouragé. Oui, le don d’organes doit être facilité. Oui, il faut permettre à chacune et à chacun de se positionner, en son âme et conscience. Cela peut être facilité par le biais de campagnes ou de contacts réguliers avec des médecins ou des associations. Oui, enfin, il faut élargir les procédures de dons entre personnes vivantes, par exemple avec le don croisé d’organes, qui a été évoqué par M. Guy Fischer voilà quelques instants.
Toutefois, nous devons être conscients que, à côté de notre régime très encadré, il existe un grand nombre de pays où le prélèvement et la greffe d’organes font l’objet d’une commercialisation.
De cela, nous ne voulons pas, et nous nous félicitons toutes et tous du fait que notre législation soit explicite en la matière, et refuse la commercialisation du corps humain. Toutefois, il nous faut, en tant que législateur, prévoir toutes les zones grises, ces petits recoins du droit où pourraient se nicher des pratiques se situant à la limite de la légalité, à la limite de l’esprit de la loi, ainsi qu’à la limite de nos principes constitutionnels.
Le développement des moyens de communication a, par définition, accru les échanges entre offre et demande d’objets en tous genres. L’exemple des sites d’enchères sur Internet montre que l’on peut quasiment tout acheter et tout vendre. Billets de trains, instruments de musique ou voitures, tout est échangeable dans un marché de gré à gré. Les sites internet concernés prospèrent du fait de la facilité qu’il y a à établir un contact entre l’offre et la demande.
Bien sûr, cet univers effrayant où nous trouverions sur ces sites qui un rein, qui un foie n’est pas pour demain. Tant mieux ! Néanmoins, certains sites d’une autre nature pourraient apparaître. Il s’agirait de sites recensant des donneurs et des demandeurs potentiels, c’est-à-dire, en quelque sorte, des « annuaires de l’organe », permettant la « mise en relation » entre un donneur et un receveur.
Se développeraient alors des marchés parallèles, incontrôlables puisque potentiellement cachés, et profitant des limites de la loi. Il serait même possible de parler de « bourses d’échange », ou de « troc d’organes », dans le cas des dons croisés.
Il faut donc prévoir cette éventualité. Aujourd’hui, je le disais à l’instant, quasiment tout se vend et s’achète sur Internet. Il n’est pas exclu que nous voyions apparaître des registres parallèles qui, même si leurs créateurs sont animés des intentions les plus pures, pourraient conduire à des pratiques illicites au regard de nos principes de non-commercialisation, d’anonymat et de gratuité du don.
L’encadrement actuel, par le biais de juges et de médecins, peut paraître suffisamment protecteur. Cependant, à notre avis, il faut prévenir toutes formes de « commerce gris », formes de mise en relation que nous ne pouvons accepter en dehors du cadre de la loi, parce qu’elles encourageraient le développement de pratiques illicites. De telles dérives doivent être prévenues, combattues et punies.
Voilà pourquoi nous vous proposons d’adopter cet amendement, mes chers collègues.