Intervention de Gilbert Barbier

Réunion du 21 juin 2005 à 16h10
Lois de financement de la sécurité sociale — Adoption d'un projet de loi organique en deuxième lecture

Photo de Gilbert BarbierGilbert Barbier :

L'Assemblée nationale n'a pas remis en cause le vote du Sénat sur ce point ; elle a néanmoins prévu que le montant de la compensation serait approuvé dans la loi de financement. C'est une petite consolation : comme le souligne dans son rapport écrit M. Vasselle, l'excellent rapporteur de la commission des affaires sociales, cette disposition permettra peut-être d'adopter un montant correspondant à la réalité du coût des allégements, face à des ministres parfois enclins à la minorer.

En deuxième lecture, notre rapporteur nous propose de renforcer l'effectivité de la compensation, notamment en réservant à la loi de financement un monopole de création des dispositifs d'exonérations non compensées.

Mon groupe apportera son soutien sans réserve à cette démarche, comme il soutiendra l'institution, proposée par la commission, d'un rapporteur général des comptes sociaux.

Il est un autre point, évoqué par M. Vasselle, sur lequel j'aimerais dire quelques mots.

L'Assemblée nationale a adopté un amendement visant à habiliter le Gouvernement à prendre par voie d'ordonnance toutes les mesures législatives permettant de garantir l'équilibre voté par le Parlement.

Certes, je peux comprendre les motivations qui ont présidé à l'adoption de cette disposition, mais cette dernière ne m'en laisse pas moins perplexe : d'habitude, en matière de dépenses sociales comme en d'autres matières, les députés comme les sénateurs sont plus soucieux d'exercer l'ensemble de leurs prérogatives...

Par ailleurs, le dispositif trahit un manque de confiance dans la réforme de l'assurance maladie que nous avons votée au mois d'août dernier.

Une procédure et une gouvernance ont été arrêtées : lorsque se produit un dérapage des dépenses de plus de 0, 75 %, un comité d'alerte tire la sonnette ; revient alors à l'assurance maladie, à la Haute autorité de santé et à l'UNCAM la responsabilité de trouver des solutions.

Avec le dispositif proposé par l'Assemblée nationale, les acteurs et les gestionnaires risquent de considérer que « sortir des clous » n'est pas si grave puisque le Gouvernement pourra prendre des ordonnances pour corriger les dérapages. C'est donc finalement une manière de les déresponsabiliser, et je ne comprends pas tout à fait cette logique.

En outre, j'ai le sentiment qu'en prévoyant la possibilité d'ordonnances rapides, d'urgence, nous entrons dans une logique de maîtrise comptable que nous ne voulions pas, car, soyons réalistes, quelles mesures le Gouvernement pourra-t-il prendre sinon une hausse des cotisations ?

Voilà pourquoi, à titre personnel, je ne suis pas favorable à cette disposition. Laissons la réforme se mettre en place, laissons les partenaires conventionnels jouer le jeu, et il sera toujours temps de constater l'évolution des choses.

Je terminerai mon propos en évoquant l'ONDAM.

Vous le savez, les dérives constantes de l'ONDAM ont alimenté le grief principal adressé aux lois de financement de la sécurité sociale. Comment, en effet, assurer la sincérité du débat et la crédibilité de la loi de financement si, chaque année, cet objectif est dépassé ? A l'évidence, le vote de l'ONDAM perdait de son sens.

Le projet de loi organique prévoit le vote de sous-objectifs. Il appartient au Gouvernement de les définir. Vous avez déjà indiqué les pistes, monsieur le ministre : soins de ville, hôpital public, hôpital privé, médico-social pour les personnes handicapées, médico-social pour les personnes âgées.

Cela constitue un réel progrès, mais, à l'évidence, cela ne suffira pas à assurer la maîtrise de l'ONDAM.

Le respect de l'ONDAM nécessite que ce dernier soit d'abord défini sur des bases médicales et que tous les acteurs soient associés en amont aux décisions et, en aval, à la gestion par une régionalisation de la santé.

Vous le savez, mes chers collègues, lors de chaque débat sur l'assurance maladie, je plaide pour la création d'agences régionales de santé associant l'ambulatoire, l'hôpital et même la prévention et le secteur médico-social.

Certes, la réforme du 24 août dernier a prévu un rapprochement des ARH, les agences régionales de l'hospitalisation, et des URCAM, les unions régionales des caisses d'assurance maladie, au sein de missions régionales de santé, et elles commencent à travailler sur les problématiques communes des secteurs du système de soins : démographie médicale, permanence de soins, coordination ville-hôpital.

Il est en effet urgent de décloisonner, mais il faut aller plus loin encore. Pourra-t-on un jour parvenir à la fongibilité des enveloppes, que nous sommes nombreux à souhaiter ?

Pour améliorer les soins et faire en sorte que ce qui relève aujourd'hui du secteur hospitalier puisse, demain, être pris en charge à domicile par la médecine de ville et réciproquement, il est nécessaire d'opérer des transferts.

Je serais heureux monsieur le ministre, que vous puissiez vous exprimer sur ces sujets.

Pour conclure, je dirai que ce texte, qui pourrait sembler n'être que technique, est en réalité très important. Nos concitoyens se posent légitimement des questions sur l'utilité, l'efficacité et le caractère équitable de la dépense sociale.

En proposant une structure plus claire, en sortant de l'annualité, en fixant des objectifs et en évaluant les résultats, en renforçant les pouvoirs de contrôle du Parlement, le présent projet de loi apporte plus de lisibilité et de sincérité. C'est pourquoi la majorité du groupe du RDSE le votera.

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