Intervention de Christiane Demontès

Réunion du 21 juin 2005 à 21h30
Lois de financement de la sécurité sociale — Article 1er

Photo de Christiane DemontèsChristiane Demontès :

Avec ce texte, nous l'avons dit, le Gouvernement entend confiner dans un rôle purement comptable le Parlement. Celui-ci, appelé à voter des objectifs de dépenses d'assurance maladie, ne peut se prononcer sur les sujets touchant à la santé, qui revêtent une importance première pour nos concitoyens.

Il y a d'ailleurs là un hiatus avec les principes mêmes de la loi du 9 août 2004 relative à la santé publique, dont l'exposé des motifs précise : « Le présent projet de loi a pour but essentiel d'affirmer la responsabilité de l'Etat en matière de politique de santé publique, ainsi que le rôle du Parlement dans ce domaine. La santé publique est en effet une préoccupation importante des citoyens, des élus et des pouvoirs publics. Or, les objectifs de la politique de santé publique ne sont aujourd'hui ni présentés ni débattus au Parlement. »

Dès lors, comment se satisfaire de cette seule dimension comptable ? A l'évidence, une telle attitude constituerait une négation des principes mêmes qui ont guidé la rédaction et l'adoption de ce texte par la majorité parlementaire elle-même.

Nul n'ignore que le niveau de prise en charge des soins par les régimes obligatoires constitue un élément essentiel du quotidien de nos concitoyens. Ainsi, le fait de contracter ou pas une complémentaire maladie en dépendra très étroitement.

Par voie de conséquence, notamment pour les plus modestes et les plus fragiles d'entre nous, c'est le niveau d'épargne ainsi que la propension à consommer qui s'en trouveront partiellement déterminés. Ce sont autant d'éléments essentiels dans un contexte économique plus que dégradé, puisque la croissance atteindra en 2005 non pas 2, 5 %, comme l'espérait le Gouvernement, mais uniquement 1, 4 %, selon les dernières statistiques communiquées par l'INSEE.

N'est-il pas paradoxal de voir le Parlement fixer un montant prévisionnel de dépenses et déléguer ensuite au directeur général de l'UNCAM, l'Union nationale des caisses d'assurance maladie, le soin de faire évoluer les taux de remboursement, ou plutôt de « déremboursement » ? Nous nous étions déjà élevés de manière véhémente contre cette logique instaurée par la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie. Celle-ci se trouve renforcée par les nouvelles prévisions de la Commission des comptes de la sécurité sociale, qui prévoit, nous l'avons appris aujourd'hui, un déficit du régime général de 11, 6 milliards d'euros, et non de 10 milliards d'euros, comme cela avait été annoncé en septembre dernier.

Les parlementaires ne peuvent accepter un tel déni de leur responsabilité, car c'est eux qui sont responsables devant leurs électeurs de l'évolution de notre protection sociale et du niveau de la solidarité devant la maladie. Il est donc essentiel qu'un débat public ait lieu sur cette question fondamentale.

Par conséquent, nous proposons que le Parlement, au même titre qu'il se prononce sur un objectif de dépenses d'assurance maladie, fixe un objectif national de couverture des dépenses de santé par les régimes obligatoires de base puis se prononce sur cet objectif.

Considérant la situation dans laquelle se trouvent nos finances publiques et compte tenu de la nature de la réforme législative des retraites et de l'assurance maladie, nous devons nous employer à faire face à une opération de privatisation rampante de notre système de protection sociale.

Parce que ces réformes lèsent et pénalisent les plus fragiles et les plus modestes, parce qu'elles ne sont pas financées et qu'elles posent la question d'une possible accélération de cette logique de privatisation, nous souhaitons que la loi de financement de la sécurité sociale de l'année fixe un objectif national de couverture des dépenses de santé par les régimes obligatoires de base.

Afin d'éviter tout dérapage, nous vous proposons de préciser que le niveau de couverture ne pourra être inférieur à celui qui est constaté à la date de l'entrée en vigueur de la présente loi.

Ainsi, nous souhaitons que la loi de financement de la sécurité sociale, et donc le Parlement qui la vote, définisse non seulement un objectif national de dépenses de santé, mais également un objectif national de couverture correspondant.

Nous poursuivons bien dans la logique des objectifs instaurée par la loi organique relative aux lois de finances et dont devrait s'inspirer ce texte. Parce que, face à la détermination avec laquelle le Gouvernement et sa majorité précarisent notre société et remettent en question les acquis sociaux, le principe de précaution est essentiel.

Aussi estimons-nous nécessaire de garantir la stabilité ainsi instaurée de l'objectif national de couverture des dépenses de santé par les régimes obligatoires. Il s'agit là de respecter le principe de solidarité, principe fondateur de notre système de sécurité sociale.

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