L'échec cuisant des lois de financement de la sécurité sociale nous donnait l'expérience suffisante pour opérer une véritable rupture. Or il n'en a rien été. C'est donc la continuité pure et simple ou, si j'ose dire, « la continuité sans changement ».
Ainsi, monsieur le ministre, vous continuez à avoir une vision comptable - ce texte la confortera -, donc restrictive, des dépenses de santé, qui organise des déremboursements, contraint les professionnels, sanctionne les assurés sociaux, asphyxie budgétairement les établissements sanitaires et sociaux, hypothèque tout espoir de revalorisation du niveau de protection. Le décrochage continuera donc, les pensions resteront plafonnées, les prises en charge demeureront réduites et les nouvelles maladies professionnelles ne seront toujours pas reconnues, faute de moyens.
Ce n'est sûrement pas l'adoption de ce projet de loi organique qui nous permettra de maîtriser les dépenses de la sécurité sociale - pas plus qu'avant, en tout cas. Nous n'assisterons pas à l'élaboration d'un ONDAM véritablement médicalisé : en dépit de multiples déclarations tout au long de la séance, c'est un domaine dans lequel nous n'avons quasiment pas progressé.
La transparence des comptes demeure insuffisante, de même que restent défaillants, quelles que soient les velléités manifestées au cours du débat, les pouvoirs de contrôle détenus par le Parlement.
Quant au principe de démocratie sociale, c'est le grand absent ! Nous avons pourtant déposé de nombreux amendements à ce sujet ; malheureusement, ils n'ont trouvé aucun écho.
En effet, le déficit n'est pas seulement comptable, il est aussi démocratique, avec l'absence de contre-pouvoirs des représentants des assurés sociaux sur les choix qui sont opérés, tandis que les pouvoirs sont concentrés entre les mains d'un seul, le directeur de l'UNCAM, véritable ... - mais je préfère ne pas prononcer le mot qui me vient à l'esprit ! - au royaume de l'assurance maladie.
Enfin, monsieur le ministre, vous continuez à éviter le débat de fond, celui du financement. Vous refusez encore et toujours de vous pencher sur le véritable problème de notre système. Plutôt que de chercher à réduire le périmètre d'intervention de la sécurité sociale, de circonscrire les dépenses, pourtant utiles, de rogner les moyens de fonctionnement des structures, il faut oser réfléchir à un nouveau mode de financement qui permette d'apporter des ressources plus importantes et pérennes.
Il est fondamental que la réforme du financement de la sécurité sociale s'accompagne d'une autre démarche, qui consiste d'abord à déterminer les besoins, ensuite à mobiliser les moyens suffisants, et non l'inverse.
Mais vous n'avez pas voulu entendre parler de ces nécessaires changements et vous avez, je le répète, rejeté tous nos amendements. C'est consternant, car, dès maintenant et plus encore demain, en raison de l'inertie du Gouvernement face aux vrais problèmes et de son incapacité à faire d'autres choix que ceux qui privilégient les intérêts privés, notre système est menacé.
Désormais, rien n'empêchera que la logique assurancielle prenne le pas sur la logique solidaire qui présidait à la création de notre sécurité sociale voilà maintenant soixante ans. La privatisation rampante de notre système a franchi un pas supplémentaire.
Avec ce projet de loi organique, nous allons dans le mur et les clignotants qui s'allument ici ou là - la branche vieillesse et la branche famille sont devenues déficitaires - ne suffiront pas à éviter la catastrophe des finances sociales que vous avez organisée.
Pour toutes ces raisons, le groupe CRC votera contre ce projet de loi organique.