Madame la présidente, madame le ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, le 28 mars dernier, à l'occasion d'une question orale avec débat sur le bilan des violences urbaines de novembre 2005, je plaidais à cette même tribune pour un élargissement du rôle des maires dans le dispositif de sécurité sur le territoire de sa commune.
C'est l'un des enseignements majeurs de la gestion de la crise de novembre 2005, dans laquelle les maires ont joué un rôle essentiel d'apaisement et de coordination.
À l'occasion de ces dramatiques événements, les maires ont souvent été en première ligne, réaffirmant sur le terrain leur statut d'acteurs incontournables de toute politique de sécurité et apportant la preuve qu'ils devaient être placés au centre du dispositif.
Ce devrait être bientôt chose faite, puisque, pas plus tard qu'aujourd'hui, l'Assemblée nationale a adopté en première lecture, à la suite du Sénat, le projet de loi relatif à la prévention de la délinquance, qui consacre enfin le rôle pivot du maire en matière de sécurité et de lutte contre la délinquance.
Il reste maintenant à examiner au plus vite ce texte en deuxième lecture, malgré un calendrier parlementaire raccourci, et plus encore à permettre son entrée en vigueur à grand renfort de décrets.
C'est en prenant en compte les dispositions contenues dans ce projet de loi qu'il faut apprécier la politique de sécurité et ses crédits pour 2007, tant ce texte ouvre de nouvelles perspectives en permettant de développer la coordination des acteurs locaux, de renforcer l'efficacité du « couple » maire-préfet, de clarifier le rôle des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance, des groupes locaux de traitement de la délinquance et des contrats locaux de sécurité.
L'année 2007 sera la cinquième et dernière année d'application de la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure, laquelle aura été une priorité constante du quinquennat.
L'objectif pour 2007 est d'abord que soient poursuivis les bons résultats enregistrés depuis 2002. En ce domaine, les statistiques sont assez éloquentes ; elles viennent d'ailleurs d'être rappelées par les orateurs précédents.
L'effort sera donc poursuivi en 2007 puisque, une fois de plus, les crédits de la mission « Sécurité » augmentent, de surcroît plus fortement que le budget de l'État.
D'une certaine façon, ces chiffres obligent nos forces de sécurité en termes de résultats. Parce qu'ils disposent du monopole de la violence physique légitime, policiers et gendarmes sont les garants de la première des libertés que constitue la sécurité, sans laquelle il n'y aurait pas d'État de droit.
L'effort de recrutement important accompli depuis 2002 permettra de porter les effectifs policiers à plus de 150 000 fonctionnaires en 2007. Quant à la gendarmerie, elle aura vu ses effectifs renforcés en cinq ans, puisque ces derniers s'élèveront à 106 000 à la fin de 2007.
De plus, le redéploiement sur le territoire des effectifs de police et de gendarmerie est sur le point d'être achevé puisque soixante-cinq départements sont d'ores et déjà concernés. Ainsi, nos dispositifs sont plus lisibles, plus clairs et, surtout, plus rationnels.
S'agissant toujours des forces de l'ordre, je voudrais vous suggérer, monsieur le ministre, que, après avoir accru nettement leurs effectifs, vous étudiiez le problème des personnels.
Même si, statutairement, une obligation de rester cinq ans en poste pèse sur les personnels, il n'en demeure pas moins que, passé ce délai, il existe une rotation trop importante, qui est préjudiciable au bon fonctionnement de l'action de police.
En effet, beaucoup de jeunes policiers se trouvent affectés dans des quartiers difficiles. Or, quand ils commencent à connaître de manière satisfaisante leur quartier d'affectation ainsi que sa population, ils demandent à être mutés ailleurs.
Il faudrait donc réfléchir à des dispositifs financiers ou statutaires permettant d'encourager leur maintien dans les quartiers difficiles, ce qui ne serait pas sans incidence sur la qualité de l'ordre et de la sécurité qui y règnent.
D'ailleurs, cette idée participe de la même logique que celle qu'a mise en avant la mission commune d'information sur le bilan et les perspectives d'avenir des politiques conduites envers les quartiers en difficulté depuis une quinzaine d'années, mission présidée par notre collègue Alex Türk et dont j'étais membre. Dans son rapport intitulé Un nouveau pacte de solidarité pour les quartiers, elle formule soixante-dix propositions s'articulant autour de sept orientations. L'une d'entre elles vise à permettre de « mieux assurer la sécurité dans les quartiers en difficulté » en réactivant « une véritable police de proximité », condition nécessaire et suffisante pour pacifier ces quartiers, réconcilier leur population et la police et ainsi rétablir l'ordre et la sécurité.
Il est essentiel, en effet, que les policiers puissent connaître le mieux possible les quartiers dans lesquels ils sont amenés à évoluer.
Bien entendu, il ne s'agit pas de supprimer la répression et la sanction ; il faut donner plus de force au respect de la loi en y associant en amont la prévention et la dissuasion. L'indispensable fermeté de la répression est d'autant plus efficace qu'elle ne constitue pas le seul pilier de notre politique de sécurité.
Il ne s'agit pas non plus de confier aux forces de sécurité le rôle dévolu aux associations, aux travailleurs sociaux ou encore aux élus. De même, il ne faut pas confier à d'autres les missions qui doivent revenir aux forces de sécurité. C'est à l'État d'assumer ses fonctions régaliennes.
Dans ma ville, par exemple, c'est la police municipale qui a dû, de fait, se substituer à la police de proximité pour occuper le terrain dans les quartiers difficiles, mais avec ses moyens et ses prérogatives, qui ne sont évidemment pas les mêmes.
Une semaine après la remise de notre rapport, le Premier ministre a plaidé en faveur d'une « police de tranquillité publique » qui doit créer « un lien de confiance avec les populations » en étant « à la fois plus présente et plus à l'écoute ».
Faut-il y voir une convergence de vues entre le Gouvernement et le rapport sénatorial ? Au-delà de la terminologie, les propositions visant à instaurer une « police de tranquillité publique », s'agissant du Premier ministre, ou à réactiver la police de proximité, s'agissant du rapport de la mission, ne procèdent-elles pas du même constat et ne visent-elles pas au même but ?
Monsieur le ministre, quelle est votre appréciation ? Ne faut-il pas, en matière de violences urbaines et de police de proximité, privilégier, au-delà de tout dogmatisme, le pragmatisme, comme le recommande M. le rapporteur spécial, Aymeri de Montesquiou ?
Pour une meilleure sécurité des Français, il nous faut également des forces de sécurité mieux équipées. La question des dotations ayant été évoquée précédemment, je n'y reviendrai pas.
À propos de caméras, je souhaiterais évoquer le rôle d'appoint que peut jouer la vidéosurveillance.
Depuis la loi du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité, les collectivités publiques n'ont cessé de renforcer les moyens de vidéosurveillance et de considérer cette dernière comme un outil privilégié, jusqu'à la loi du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers, qui intensifie le recours à celle-ci.
Cependant, près d'un an après l'entrée en vigueur de cette loi, certains décrets en Conseil d'État relatifs à la vidéosurveillance sont toujours en attente de publication. Je ne peux que regretter ce retard et espérer que ces décrets ne tarderont pas à paraître. Disposez-vous d'informations particulières à ce sujet, monsieur le ministre ?
Enfin, je voudrais vous faire part d'une difficulté que nous rencontrons s'agissant de la formation des policiers municipaux habilités à porter une arme.
En effet, le décret du 24 mars 2000 fixant les modalités d'application de l'article L. 412-51 du code des communes et relatif à l'armement des agents de police municipale prévoit que les agents de la police municipale autorisés à porter une arme de quatrième catégorie reçoivent une « formation dispensée par l'État ou des groupements sportifs agréés », formation correspondant à deux séances d'entraînement et à cinquante cartouches tirées par an.
Or je suis confronté, madame le ministre, monsieur le ministre, aux refus de la gendarmerie comme de la police nationale de former les agents de police municipale, au motif que cela n'entrerait pas dans leurs prérogatives.
Pour conclure, je voudrais souligner, après M. Karoutchi, que, s'il faut poursuivre l'effort réalisé en matière d'investissement pour les commissariats situés dans les grandes zones urbaines, il ne faut pas négliger pour autant les commissariats situés dans les villes moyennes. À cet égard, j'appelle votre attention, monsieur le ministre, sur les négociations qui ont été engagées à Dole pour aboutir rapidement à la création d'un commissariat digne de ce nom.
Tels sont les différents sujets que je souhaitais aborder sur ce thème de la sécurité, si essentiel pour le bon fonctionnement de notre société et la qualité de notre « vivre ensemble ».
La majorité des membres du groupe du RDSE, y compris moi-même, voteront les crédits de la mission « Sécurité ».