Sans vouloir allonger outre mesure nos débats, je dirai malgré tout quelques mots, car j’ai déposé l’un des amendements identiques qui visaient à introduire cet article dans le projet de loi et qui ont été adoptés.
Avant ce vote, le Gouvernement avait donné au Sénat des explications similaires à celles qu’il développe dans l’objet de cet amendement de suppression : au fond, la compétence générale n’aurait pas de valeur normative et, en quelque sorte, n’existerait pas.
Un tel argument est très étonnant, messieurs les ministres, permettez-moi de vous le dire, car vous avez indiqué clairement votre volonté de supprimer la clause de compétence générale pour les départements et les régions !
D'ailleurs, le comité Balladur s’était interrogé sur ce point. Nous le savons, les juristes étaient divisés, mais M. Balladur avait conclu que la suppression de la clause de compétence générale ne poserait sans doute aucun problème constitutionnel.
Les membres de mon groupe et moi-même ne sommes pas du même avis. D'ailleurs, vous avez maintenu formellement cette disposition pour les communes qui, de toute façon, seront privées de toutes leurs compétences par l’intercommunalité forcée…
Or une collectivité qui n’a plus que des compétences déléguées et ne peut prendre des initiatives en faveur de l’intérêt départemental ou régional ne dispose plus d’aucune marge de manœuvre. J’en suis désolée, mes chers collègues, mais on ne peut pas prétendre qu’elle s’administre librement ! Elle n’est plus qu’un rouage de l’État, dont les seules compétences sont déléguées par la loi et seront, en outre, si votre projet aboutit, strictement encadrées sur le plan financier. Nous tenons donc beaucoup à cette clause.
J'ajoute que le vote du Sénat sur l’article 35 va tout à fait dans ce sens, comme notre collègue Jean-Pierre Sueur vient de le rappeler. D'ailleurs, cette disposition vous avait déjà posé problème, messieurs les ministres : vous avez été obligé de revenir en arrière en ce qui concerne les compétences relatives à la culture, au tourisme et au sport, car des protestations s’élevaient de toutes parts. En effet, ces différents domaines d’activité n’auraient plus été pris en charge par personne, ce qui aurait posé un grave problème !
À l’heure actuelle, l’article 35 ne définit pas les compétences des collectivités : en fait, il n’existe plus ! Une loi déterminera ultérieurement la répartition des compétences déléguées. Vous pourrez alors aisément poser de nouveau la question de la clause générale de compétence.
Vous verrez, messieurs les ministres, que vous serez obligés d’introduire une disposition aux termes de laquelle les collectivités, quelles qu’elles soient, peuvent prendre des initiatives, car si vous ne le faites pas les collectivités territoriales et surtout les citoyens se retrouveront dans une situation inextricable !
Je crois donc que les sénateurs feraient bien de maintenir leur vote et de sauvegarder la possibilité pour les départements et les régions de prendre des initiatives.