Je suis convaincu que la décentralisation, parce qu’elle rapproche la décision du citoyen, qu’elle fait vivre les territoires, qu’elle humanise les décisions, est une ligne d’avenir pour notre pays.
Naturellement, sa réalisation est une tâche difficile et complexe. C’est pourtant un cap qu’il faut garder, mais on a le sentiment que, dans ce texte, comme dans d’autres, il n’est plus prioritaire.
Aussi, et je le dis avec la conviction de ceux qui, dans ce pays, sont de la race des girondins, je trouve que, très souvent aujourd’hui, on entend fortement les jacobins.
Néanmoins, ce texte comporte une orientation qui, me semble-t-il, peut être positive. Le problème, c’est qu’elle n’est pas achevée. Elle repose, dirai-je, sur un pari et un projet.
Le pari, c’est le conseiller territorial. Très sincèrement, le projet du conseiller territorial peut faire avancer la décentralisation. En effet, le conseiller territorial sera un élu qui aura plus de pouvoirs, qui sera, sur le terrain, plus responsable, davantage acteur, plus proche des citoyens et plus à même de les représenter et d’agir pour eux.
Le conseiller territorial sera l’agent unificateur qui permettra de donner plus de puissance à la décentralisation et, au fond, de revenir sur certaines formes de dispersion. L’essentiel de ce texte est de faire en sorte que le conseiller territorial peut être celui qui donne au territoire, à son enracinement, un avenir avec une capacité d’action renforcée.
Je suis heureux que l’article 35 ait pu être fondamentalement modifié, car cela n’aurait pas de sens de donner à un conseiller territorial de la puissance si la question des compétences ne donnait pas lieu à un débat. Je l’ai dit, tels que les textes étaient présentés à l’issue des travaux de l’Assemblée nationale, le débat sur les compétences était escamoté dans cet article 35. Le Sénat a bien fait de reprendre ce sujet et de le renvoyer à une loi sur les compétences.
Permettez-moi, monsieur le président, de citer, de mémoire, un article que vous avez publié dans un grand quotidien du matin, lorsque l’on accusait la décentralisation de coûter trop cher en termes d’élus. Vous aviez alors indiqué – les chiffres que je rapporte ne sont peut-être pas tout à fait exacts – à peu près 26 millions d’euros pour le total des indemnités et 22 milliards d’euros pour le total des compétences. Si l’on veut redresser un pays qui a trop de dettes et de déficits et qui a besoin de faire des efforts, auxquels la décentralisation doit participer, il est clair que l’on fera plus d’économies sur les 22 milliards d’euros que sur les 26 millions d’euros !
On ne peut donc faire ces économies que si l’on harmonise les compétences en les structurant, si l’on garde des compétences partagées et, bien entendu, des capacités d’initiative, et si l’on utilise ce que nous avons déjà créé, c'est-à-dire le chef de file dans le cas où les compétences sont partagées.
C’est pour cela que le texte de loi que le Gouvernement doit préparer devrait être un grand projet pour le Sénat, monsieur le président, un texte complexe de clarification des compétences pour l’avenir. Nous avons là une ligne directrice importante.
Par conséquent, grâce au pari, le conseiller territorial, et à l’enjeu, le grand texte sur les compétences, nous avons fait progresser la démarche. Ces deux acquis, en dépit de la longueur et de la difficulté de la tâche, valent la peine de poursuivre dans cette voie.
Je le répète, le travail n’est pas achevé ; il ne le sera pas sans le Sénat. À cet égard, je veux rassurer M. Bel. Ne soyons pas inquiets : bien sûr, l’Assemblée nationale peut avoir le dernier mot, mais personne dans ce pays ne pourra toucher à la décentralisation sans l’accord du Sénat ! D’une manière ou d’une autre, il faudra venir le chercher.
L’accord du Sénat est indispensable à la vie de nos territoires. Soyons apaisés, défendons nos convictions ! Nous n’avons pas atteint tous les objectifs, mais nous pouvons néanmoins considérer que nous avons franchi des étapes importantes. Nous devons continuer le travail.