Intervention de Nicole Bricq

Réunion du 18 décembre 2006 à 15h00
Loi de finances rectificative pour 2006 — État b

Photo de Nicole BricqNicole Bricq :

Nous voici parvenus à l'article 14, qui ouvre des autorisations d'engagement et des crédits de paiement supplémentaires à l'état B.

Mon intervention portera sur les 38, 5 millions d'euros d'autorisations d'engagement et de crédits de paiement destinés à répondre - très imparfaitement ! - aux besoins des préfectures pour l'indemnisation personnelle de ceux qu'il est convenu d'appeler, trois ans après, les « sinistrés de la sécheresse de 2003 ». Ces 38, 5 millions d'euros ne permettront pas, bien évidemment, de mettre fin à l'angoisse de ces familles.

Sous la pression des élus, notamment ceux du Sénat - je rappelle que deux propositions de loi, l'une de M. Claude Biwer, l'autre du groupe socialiste, que j'avais eu l'honneur de défendre, ont été débattues en juin de l'année passée -, le Gouvernement s'était engagé à dégager 180 millions d'euros pour ces indemnisations. Aujourd'hui, il débloque 38, 5 millions d'euros supplémentaires.

Le Gouvernement n'a pas anticipé la mise en oeuvre de la procédure exceptionnelle créée par la loi de finances pour 2006. Les sinistrés ont en effet rencontré des difficultés pratiques pour constituer leur dossier, en particulier pour produire des devis et respecter les délais impartis. Le Gouvernement a donc revu sa copie, une première fois dans la loi portant engagement national pour le logement, une seconde fois à l'occasion du projet de loi de finances rectificative.

Par ailleurs, le Gouvernement n'a pas correctement évalué le montant nécessaire à l'indemnisation des sinistrés éligibles à la procédure exceptionnelle, comme en témoigne le déblocage de 38, 5 millions d'euros supplémentaires.

En outre, les crédits étant déjà engagés, les départements ne recevront pas plus que ce qui leur avait déjà été alloué. Ainsi, l'enveloppe de 17, 8 millions d'euros qu'a déjà reçue la Seine-et-Marne, département que vous connaissez bien, monsieur le ministre délégué, ne sera pas augmentée.

Il est important d'être clair sur cette question afin de ne pas susciter de faux espoirs chez les familles dont l'habitation est sinistrée et dont l'indemnisation sera d'un montant bien inférieur à celui des travaux.

Pour pallier les dysfonctionnements du régime des catastrophes naturelles prévu par la loi de 1982, que la sécheresse de 2003 a particulièrement mis en exergue, une proposition de loi a été adoptée ici même. Il s'agissait d'un compromis, mais le groupe socialiste l'a voté. Ce texte a malheureusement subi le sort que l'on réserve à de nombreuses propositions de loi votées ici, c'est-à-dire qu'il n'a pas fait l'objet de la navette et qu'il n'a toujours pas été débattu à l'Assemblée nationale. Il y a fort à parier qu'il ne le sera pas d'ici à la fin de la législature.

Un événement nouveau me conduit à intervenir sur ce point précis du collectif budgétaire. Le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie et le ministère de l'intérieur ont élaboré un avant-projet de loi - il en a été question dans la presse - qui remet en cause les principes de la solidarité nationale de la loi de 1982, auxquels les membres de la majorité semblaient pourtant attachés puisqu'ils avaient voté en juin de l'année dernière la proposition de loi de Claude Biwer et la mienne, confondues.

Le dispositif que vous prévoyez est finalement une privatisation pure et simple du régime des catastrophes naturelles. Nous ne sommes évidemment pas d'accord, même si ce n'est pas le lieu pour en discuter. Les assureurs, que vous avez interrogés et à qui vous envisagiez par ce texte de confier l'ensemble du dispositif, vous ont fait savoir que, à ce jour, ils n'y étaient pas favorables. Ils jugent la mesure prématurée.

Je souhaite donc connaître les intentions du Gouvernement sur ce projet de loi et attirer son attention sur ce qu'il reste à faire.

Je vous rappelle que 4 400 communes n'ont pas été déclarées en état de catastrophe naturelle suivant la loi de 1982, que nombre de familles sont encore dans l'expectative et qu'elles n'ont pas pu présenter de dossier dans les délais impartis.

Les besoins avaient été estimés à 1 milliard d'euros. Les 180 millions d'euros, ainsi que les 38, 5 millions d'euros supplémentaires, ne correspondent donc qu'à une part infime de cette estimation.

Si nous sommes favorables aux 38, 5 millions d'euros supplémentaires prévus dans le collectif budgétaire, nous sommes en revanche défavorables à la réforme que vous envisagez. Peut-être allez-vous la retirer, monsieur le ministre délégué ? J'attends votre réponse sur ce point.

Enfin, et surtout, que fait-on de tous ceux qui restent sur le carreau et qui, je puis vous l'assurer, sont réellement angoissés ? Le collectif de la région Île-de-France a manifesté la semaine dernière devant l'Assemblée nationale. Il existe d'autres collectifs dans de nombreux départements sinistrés. Ils n'ont toujours pas reçu de réponse à leurs interrogations, monsieur le ministre délégué.

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