Intervention de François-Noël Buffet

Réunion du 24 mars 2010 à 14h30
Garde à vue — Renvoi à la commission d'une proposition de loi

Photo de François-Noël BuffetFrançois-Noël Buffet :

Monsieur le président, madame le ministre d’État, mes chers collègues, M. Jean-Marie Delarue, Contrôleur général des lieux de privation de liberté, a constaté dans son rapport d’activité, en se référant aux registres des gardes à vue, principaux outils de contrôle de cette procédure, « l’augmentation constante depuis quinze ans » du nombre de gardes à vue.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : le nombre de personnes placées en garde à vue a presque doublé, passant de 276 000 environ en 1994 à 580 000 en 2009. Cette augmentation est d’autant plus éloquente que le chiffre de 2009 ne prend en compte ni les 37 500 personnes gardées à vue dans nos territoires ultramarins ni les 150 000 placements consécutifs à des infractions routières. Ce sont donc environ 800 000 personnes qui ont été gardées à vue l’année dernière.

Ce constat fait état d’une évidence et pose, en même temps, une question essentielle sur l’usage de ce dispositif. En effet, le taux d’élucidation des crimes et délits, dont vous nous avez fait part le 9 février dernier, madame le ministre d’État, est passé de 25 % à 40 % depuis 2002. Sans établir un lien direct entre ces deux séries de statistiques, et sans vouloir en tirer de conclusion hâtive, je note que l’action menée par la police et la gendarmerie dans le cadre des placements en garde à vue a permis aux services d’élucider un grand nombre d’affaires. Nous ne devons donc pas confondre le principe de la garde à vue, qui est un dispositif nécessaire, et les conditions dans lesquelles elle se déroule.

Toutefois, il est encore plus certain, aux yeux de tous, que cette procédure s’est banalisée au cours des années. Comme le rappelait le Premier ministre, le 21 novembre dernier, « la garde à vue est un acte “ grave ” qui ne doit pas être envisagé comme un élément de “ routine ” par les enquêteurs ».

C’est pourquoi il nous faut désormais contrôler qualitativement cette procédure en termes tant de respect des droits de l’individu que d’assistance des personnes par l’intervention d’un avocat.

À la suite du débat sur une question orale organisé par notre Haute Assemblée le 9 février dernier, la proposition de loi présentée par Jacques Mézard et nos collègues du groupe RDSE appelle une nouvelle fois notre attention sur les « dérives » de la garde à vue, qui viennent souvent ternir notre image d’État de droit garant des droits et des libertés individuelles, auxquels nous sommes tous attachés.

Le Président de la République s’est prononcé pour un habeas corpus à la française.

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