Intervention de Jean-Pierre Michel

Réunion du 24 mars 2010 à 14h30
Garde à vue — Renvoi à la commission d'une proposition de loi

Photo de Jean-Pierre MichelJean-Pierre Michel :

Monsieur le président, madame le ministre d’État, mes chers collègues, la proposition de loi de notre collègue Jacques Mézard et de ses amis du groupe RDSE nous pose deux questions.

La première est très simple : faut-il adopter cette proposition de loi ?

Oui, bien sûr ! Je ne vais pas revenir sur les raisons abondamment exposées par mon collègue. J’en retiendrai deux : d’une part, l’inflation considérable du nombre de gardes à vue, dans lequel on met d’ailleurs un peu de tout – vous l’avez dit vous-même, madame le garde des sceaux – ; et, d’autre part, la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, constante à travers de nombreux arrêts, qui, certes, ne concernent pas notre pays mais qui s’appliquent cependant à tous les États qui ont signé la convention, c’est d’ailleurs l’avis unanime de la doctrine, notamment de M. Gabriel Roujou de Boubée, qui, de mon point de vue, n’est pas un révolutionnaire !

Seconde question : quand faut-il adopter cette proposition de loi, maintenant ou plus tard ?

Selon vous, madame la garde des sceaux, il faudrait adopter ses dispositions plus tard, mais avec l’ensemble du projet de loi que vous nous présenterez.

Vous entendez en effet modifier profondément la procédure pénale, notamment l’instruction, c’est-à-dire la phase située entre la commission de l’infraction et le jugement, pour les affaires, par hypothèse, les plus graves, puisqu’elles nécessitent une instruction préalable.

Ce projet de loi modifierait donc consubstantiellement la nature de la garde à vue.

En effet, aujourd’hui, la garde à vue se situe dans une phase antérieure à l’instruction, pour les affaires concernées, de sorte que l’on a pu admettre qu’elle ne présente pas les mêmes garanties que la procédure d’instruction qui, elle, assure à la personne mise en examen toutes les garanties indispensables.

D’ailleurs, bien souvent, lorsqu’un juge d’instruction interroge pour la première fois le mis en examen, il lui demande s’il confirme ou s’il infirme les procès-verbaux et les auditions réalisés en garde à vue. En fonction des réponses, l’instruction prend le cours qu’il convient.

Demain, si le texte que vous présentez est adopté en l’état, madame le ministre d’État, le processus se déroulera tout à fait différemment, puisque les auditions, les premiers interrogatoires, les premières dépositions et les premiers procès-verbaux réalisés tout au début de l’enquête feront foi jusqu’au jugement, sans aucun contrôle postérieur, et ce, je le répète, pour les affaires les plus graves, par définition.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion