Comme M. le rapporteur, j'ai le sentiment de me retrouver deux ans en arrière. A l'époque, la situation était beaucoup plus difficile, car, avec la suppression de la notion de taux d'usure, c'était en réalité un véritable interdit que nous osions braver, et un interdit qui nous renvoyait à l'Antiquité. La crainte était générale dans les deux assemblées, chacun pronostiquant les pires effets d'une levée du taux de l'usure qui existait depuis des siècles en France. Nous l'avons fait. Et que s'est-il passé ? Une catastrophe ? Pas du tout ! Au contraire, les taux de crédit aux entreprises sont restés stables, et même ont diminué dans de bien nombreux cas, comme en témoignent les enquêtes de la Banque de France. Mieux encore, il a été démontré que des concours nouveaux ont pu être accordés à des entreprises qui, dans l'état antérieur du droit, n'auraient pas pu avoir accès à ces financements.
On voit donc bien que la banalisation de la situation française, jusqu'alors atypique, exceptionnelle - nous étions le seul pays d'Europe à continuer à pratiquer l'interdiction de ces taux - s'est produite au bénéfice de notre économie.
Aujourd'hui, nous vous proposons de franchir un pas de plus dans cette simplification, à la demande d'associations très engagées dans le financement de l'économie sociale, notamment l'ADIE, l'Association pour le droit à l'initiative économique de Maria Nowak, que tout le monde connaît. Voici une association qui, dans les quartiers les plus difficiles de France, soutient l'initiative économique, en fait un outil de promotion sociale, de réussite sociale au profit de nos concitoyens les plus défavorisés, ceux qui ont le moins de chance d'accéder à des financements. C'est cette association qui, aujourd'hui, soutient cette mesure, preuve qu'elle a une dimension sociale évidente.
J'ajoute, sur le plan technique, que cette mesure permettra le développement du cautionnement mutuel, actuellement freiné par le faible niveau de l'usure, qui dissuade les banques de proposer le recours à une garantie pour l'emprunteur au risque, en effet, d'excéder l'usure. C'est ainsi que l'on a actuellement des taux de 6, 43 % pour les prêts à taux fixe à plus de deux ans, soit au-delà du taux de l'usure.
Je précise que c'est une mesure typiquement de micro crédit. Nous souhaitons développer ce type de financement pour des créateurs à l'heure actuelle exclus du système bancaire.
Enfin, cela va permettre l'émergence de nouveaux types de concours financiers, comme les prêts avec intéressement prévus à l'article 9 de cette loi, autre innovation très importante de ce texte puisque l'on va associer le prêteur à la réussite du projet. Il est important que les banquiers puissent être associés au risque économique beaucoup plus qu'ils ne le sont aujourd'hui.
En ce qui concerne l'étude d'impact, je ne suis pas favorable à son inscription dans la loi. D'abord, parce que le délai prévu me paraît un peu court et, ensuite, parce que nous disposons, notamment avec les études de la Banque de France, d'informations très complètes et à la disposition de tous, y compris du Sénat. Cela devrait permettre de dresser un bilan suffisamment précis de l'application d'une mesure que je crois extrêmement prometteuse, notamment pour les plus défavorisés de nos concitoyens lorsqu'ils veulent créer des entreprises.