Deuxièmement, se pose la question de l'étroitesse de l'assiette. Je suis très sensible à cet argument et, là aussi, le choix a été difficile.
Nous avons tenté de trouver une assiette conforme à la directive européenne, en excluant en particulier du champ de la taxe toutes les industries qui utilisent le charbon comme matière première et non comme source d'énergie, c'est-à-dire la sidérurgie. Nous avons également utilisé l'exonération autorisée par la Communauté européenne concernant le charbon utilisé pour la production d'électricité : on ne peut pas renchérir la production d'électricité dans une situation où la sécurité de l'approvisionnement des consommateurs est en jeu. Tout cela est tout à fait compréhensible.
Troisièmement, l'idée de compléter les accises sur le pétrole - donc la TIPP -, le gaz naturel et, désormais, le charbon, par une taxe sur les émissions de CO2, comme Mme Bricq l'a proposé dans son amendement discuté tout à l'heure, n'est pas forcément bonne. En effet, elle inflige une double punition aux industriels français - je ne dis pas double peine parce que cette formule est un peu galvaudée - et sa seule conséquence serait un risque de délocalisation vers des pays qui n'adhèrent pas forcément au protocole de Kyoto. Nous aurions vraiment tout perdu !
Au contraire, Dominique de Villepin a proposé à nos partenaires européens, lors du dernier comité interministériel du développement durable, de mettre en place, dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce, l'OMC, un accord commercial multilatéral qui permette de surtaxer les importations en provenance des pays qui n'adhèrent pas au protocole de Kyoto, conciliant ainsi compétitivité et protection de l'environnement.
Je signale que nous nous inscrivons ainsi dans la droite ligne de ce que préconise la majorité depuis un certain temps. Il s'agit non plus d'afficher un parti pris idéologique ni de fustiger sans cesse les entreprises, mais d'essayer de trouver une approche combinée.
Quatrièmement, il faut déterminer le taux de la taxe sur le charbon. Celui-ci a été choisi pour assurer la neutralité de la fiscalité entre les différentes sources d'énergie fossile. Le taux minimum communautaire prévu par la directive est de 0, 54 euro par mégawattheure. Mais le principal concurrent du charbon est le gaz naturel : pour éviter toute distorsion de concurrence entre deux sources d'énergie fossile dont les dommages environnementaux sont équivalents, nous avons choisi, logiquement, d'appliquer au charbon le taux de 1, 19 euro par mégawattheure, qui est celui la taxe intérieure sur la consommation de gaz naturel.
Cinquièmement, se pose la question de la date d'entrée en vigueur de la taxe, objet des amendements présentés par MM. César et Détraigne. Là aussi, je vous parlerai franchement : autant nous avons beaucoup progressé au Sénat sur des sujets totalement vierges, autant cette question nous a longuement occupés à l'Assemblée nationale.
J'ai souhaité faire une ouverture. Le projet initial du Gouvernement prévoyait d'appliquer la taxe à compter du 1er janvier 2007. On m'a fait valoir qu'on ne pouvait pas être brutal avec les entreprises et qu'il fallait prévoir un délai, non pas de concertation, mais de mise en application du système. J'ai rétorqué, de mon côté, qu'il fallait trouver une bonne mesure.
Repousser l'entrée en vigueur de la taxe au 1er janvier 2008, alors qu'une échéance présidentielle majeure intervient en mai 2007, c'est évidemment prendre le risque de fragiliser considérablement notre position vis-à-vis d'une opinion publique qui a toujours eu - je me permets de le dire en présence de la gauche, en lui demandant de ne pas trop sourire - ...