Lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005, j'avais attiré l'attention du ministre de la santé sur d'éventuelles dérives dans la commercialisation des médicaments génériques. N'ayant pas reçu de réponse satisfaisante sur le fond, je me permets de reprendre aujourd'hui mon propos.
Comme vous le savez, l'article L. 5121-10 du code de la santé publique rend possible l'obtention d'une autorisation de mise sur le marché pour un médicament générique deux ans avant l'expiration des droits de propriété intellectuelle qui s'attachent à la spécialité de référence.
Cette disposition, introduite en décembre 2003, permet un accès plus rapide des médicaments génériques au marché.
Certains, jouant les Cassandre, nous assuraient voilà quelques années que le médicament générique ne marcherait jamais. Les chiffres démontrent qu'ils ont eu tort : son taux de pénétration est en progression constante dans notre pays !
L'article L. 5121-10 du code de la santé publique devrait renforcer encore cette tendance. Cependant, en prévoyant l'inscription de la spécialité générique dans le répertoire des groupes génériques dès l'obtention de l'autorisation de mise sur le marché, il favorise aussi le risque de commercialisation illicite.
En effet, les fabricants peuvent avoir la tentation - et il semble que certains y succombent assez facilement - de commercialiser leurs produits sans attendre l'expiration des brevets. Cela leur est d'autant plus facile que l'inscription au répertoire rend possible la substitution sans considération de la validité des brevets.
N'ayant pas les moyens de vérifier cette validité, les pharmaciens peuvent ainsi se rendre complices malgré eux de contrefaçons, en exerçant leur droit de substitution.
Vous le savez, face à de telles dérives, les titulaires de brevets ont bien des difficultés à faire valoir leurs droits devant les tribunaux, en raison de l'inefficacité des procédures de référé, de la longueur des actions en contrefaçon et de l'incertitude qui pèse sur l'issue des procès.
Il me paraît primordial de garantir à ces titulaires de brevets une exploitation paisible de leurs produits. Le médicament princeps et le générique ont tous deux leur place dans le système de santé, comme le soulignent de nombreuses discussions relatives au projet de loi de financement de la sécurité sociale. Le développement de l'un ne doit pas pénaliser l'autre.
Certains proposent la création d'un registre des brevets des médicaments, à l'instar de l'Orange book américain. Hébergé par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé et vérifié par l'Institut national de la propriété industrielle, celui-ci permettrait à toutes les parties d'avoir accès facilement aux informations relatives à la validité des titres de propriété intellectuelle et de pouvoir agir en connaissance de cause.
Monsieur le ministre, je souhaiterais connaître votre opinion sur cette proposition. Il me semble que la création d'un registre des brevets ne ralentirait en rien l'arrivée sur le marché des génériques : aux Etats-Unis, où ce registre existe, une boîte de médicaments sur deux contient des génériques !