En troisième lieu, ce rapport fait la part belle à une théorie sur le papier très séduisante : celle des métiers « en tension ». D’un côté, des secteurs économiques peinent à trouver des candidats à l’emploi durable ; de l’autre, des jeunes n’arrivent pas à trouver du travail. La tentation est forte de rapprocher les deux pour que ces jeunes s’orientent massivement et mécaniquement vers ces secteurs demandeurs de main-d’œuvre.
Je souhaite que nous brisions les tabous. Tout à l’heure, vous en avez levé un, monsieur le rapporteur, et je vous en sais gré. Ne pourrait-on pas prolonger cette expérience intéressante ? Pourquoi ces métiers ne sont-ils pas suffisamment attractifs ? Pourquoi les jeunes ne se dirigent-ils pas davantage vers ces filières demandeuses ?
À ce titre, je regrette vivement que le rapport passe sous silence le fait que les entreprises confrontées à des difficultés de recrutement ont également la responsabilité, si elles souhaitent fidéliser leurs employés, de rendre plus attractifs les métiers concernés. Certaines d’entre elles – n’hésitons pas à le dire, puisque nous brisons les tabous – proposent des salaires insuffisants et des conditions de travail pénibles, recourent massivement à la précarité, n’assurent aucun tutorat ni aucune formation réelle, ne prennent pas en compte les difficultés de logement ou de transport. Et elles se plaignent ensuite de ne trouver personne !
La Fédération nationale des travaux publics a commencé à se pencher sur ce problème et a engagé, avec un certain succès, des mesures concrètes pour fidéliser ses employés. Nous devons encourager d’autres fédérations à suivre cet exemple.
Dans quelque temps, nous aurons à débattre de la mise en œuvre de la TVA à 5, 5 % dans la restauration, qui est un secteur sous tension. J’y vois l’occasion de conditionner la diminution de la TVA à un véritable engagement des entreprises à revaloriser les rémunérations et les conditions de travail de leurs employés, et à contribuer ainsi à rendre plus attractifs des métiers qui, s’ils sont passionnants, nécessitent une forte technicité.
Je suggère que l’État et les filières de la restauration signent une charte en faveur de l’emploi et de la formation des jeunes. J’aurais aimé que le rapport définisse comme prioritaire la nécessité de poser des contreparties fortes à la mise en place de la TVA à 5, 5 % dans ce secteur. Le Gouvernement ne peut pas manquer une telle occasion de passer du discours aux actes.
Mes chers collègues, le taux de chômage des jeunes de seize à vingt-cinq ans est passé en peu de temps à 21, 2 % et 600 000 jeunes vont entrer en septembre sur le marché du travail. Les perspectives qui s’ouvrent à eux sont terriblement sombres. Dans certains quartiers sensibles, nous devons en être conscients, la situation est désespérante. Nombre de jeunes ont le sentiment de n’avoir aucun avenir.
Dans un sondage récent, 51 % des personnes interrogées déclaraient ne pas avoir confiance dans la jeunesse. Ce sont pourtant ces jeunes qui constituent l’avenir de notre société et qui contribueront, par leur travail, à assurer demain le financement des retraites et à alimenter la croissance, qui nous fait cruellement défaut aujourd’hui.
Mes chers collègues, notre responsabilité est grande. Comme la présidente Raymonde Le Texier l’a justement rappelé, notre mission ne fait que commencer. Je suis de plus en plus convaincu qu’il faut faire de l’emploi des jeunes une véritable urgence nationale, pas seulement dans les discours, mais aussi dans les actes.