Chacun d’entre nous sait que la crise ne fait qu’amplifier le problème récurrent du chômage des jeunes.
La flexibilité accrue du marché du travail pèse, pour une large part, sur leurs épaules : dans le secteur privé comme dans la fonction publique, ils servent souvent de variable d’ajustement.
En marge de l’actualité conjoncturelle, il convient de ne pas négliger un aspect déterminant qui est la perte de sens, voire la perte du sens même de notre culture.
Depuis le siècle dernier, le travail s’impose comme une notion centrale. La formation doit déboucher sur l’emploi ; l’emploi assure l’autonomie. Cette centralité est en adéquation avec notre culture, qui établit que l’épanouissement de la personne est intimement lié à son activité professionnelle.
Aujourd’hui encore plus qu’hier, la réalité économique détruit cette logique, mais aussi l’emploi, la qualité du parcours pour y parvenir, les conditions de travail et, parfois, toute perspective d’épanouissement.
En 2008, seulement 26 % des jeunes Français jugeaient leur avenir prometteur, contre 60 % au Danemark et 54 % aux États-Unis.
C’est dans ce contexte que s’effectue le précieux travail des missions locales ; précieux parce qu’il relève de l’accompagnement de publics à qui l’on ne cesse de promettre des solutions qui tardent à venir ou auxquelles on ne croit plus depuis longtemps.
La notion d’accompagnement est cruciale. Un seul chiffre vous convaincra : en 2007, grâce aux missions locales, 600 000 jeunes ont trouvé un emploi bien qu’ils n’aient pas été inscrits à l’ANPE ni répertoriés dans vos statistiques.
Ces résultats attestent que les missions locales ont développé un savoir-faire contribuant sans aucun doute à restaurer le sens et la valeur – la vraie ! – du travail dans notre société, comme en leur temps les emplois-jeunes avaient eu pour vertu d’intégrer le public concerné dans un parcours cohérent au sein du monde du travail en le maintenant à distance de la précarité.
L’actuel gouvernement considère ouvertement que l’insertion des jeunes a un coût élevé. Cette conception étriquée ne prend pas en compte la notion incontournable du coût évité.
Si ce rapport valorise les missions locales, et l’on doit s’en féliciter, il s’abstient de préconiser une augmentation de leurs moyens alors que le nombre de jeunes concernés ne cesse de croître. Au moment où les charges des missions locales augmentent, leur budget stagne désespérément depuis 2005. À l’heure actuelle, un conseiller de mission locale peut suivre jusqu’à 400 jeunes sur l’année… C’est plus qu’incompréhensible : c’est inadmissible ! Comment concevoir un accompagnement personnalisé réalisable dans ces conditions ?
Monsieur le haut-commissaire, envisagez-vous de prendre les mesures budgétaires qui s’imposent pour donner aux missions locales, qui n’ont plus à faire la preuve de leur utilité et de leur efficacité, les moyens nécessaires à leur bon fonctionnement ?
En parlant de coût évité, monsieur le haut-commissaire, je fais référence à un rapport qu’avait remis au Gouvernement, en 1990, un homme que vous connaissez bien, M. Claude Alphandéry, puisque ce rapport au gouvernement traitait du coût évité des politiques sociales.