Intervention de Jacky Le Menn

Réunion du 19 novembre 2008 à 22h00
Financement de la sécurité sociale pour 2009 — Article 39

Photo de Jacky Le MennJacky Le Menn :

Je souhaite évoquer le « traitement » que l’on fait subir à l’hôpital public au travers de la fixation de l’ONDAM. Si l’on n’y prend garde, nos structures hospitalières publiques risquent de se trouver asphyxiées à très court terme. Je doute toutefois que cette situation soit le fruit du hasard…

Mon propos portera donc sur l’insuffisance du taux d’évolution de l’ONDAM pour nos hôpitaux publics. En effet, le PLFSS prévoit une progression des dépenses hospitalières d’un peu plus de 3 %, alors que l’augmentation des charges, à moyens constants, devrait s’élever mécaniquement à 4, 15 %. Cet écart conduira un nombre croissant d’établissements publics à un nouveau déficit particulièrement lourd, qui, par la suite, leur sera bien évidemment reproché, avec toutes les conséquences que cela impliquera, notamment pour les gestionnaires des établissements.

Sans méconnaître les efforts d’efficience que doit poursuivre l’hôpital public, force est de constater que sa part dans les dépenses de santé n’a cessé de baisser depuis de nombreuses années.

Outre les conséquences budgétaires dangereuses, déjà connues, de ces sous-financements répétés – recours accru à l’emprunt, projets d’investissement gelés ou remis en cause, reprises sur provisions –, les plans d’économie aujourd’hui mis en œuvre comprennent de fortes mesures de réduction de la masse salariale et de l’emploi, sur lesquelles je reviendrai lorsque nous examinerons l’article 42 bis.

Vous le savez, madame la ministre, l’hôpital public assure des missions d’intérêt général aujourd’hui insuffisamment reconnues, même si les crédits qui leur sont affectés tendent à augmenter dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 et dans le PLFSS pour 2009.

Ainsi, l’enseignement, la recherche et l’innovation –missions dont l’exercice est fondamental pour doter notre pays des compétences médicales et paramédicales qu’il est en droit d’attendre –, relèvent principalement des centres hospitaliers universitaires, les CHU. Le sous-financement de ces activités explique en grande partie les déficits que connaissent la quasi-totalité des CHU.

De même, la permanence des soins est principalement assurée par les services des urgences et d’accueil, qui sont du ressort presque exclusif de l’hôpital public.

L’hôpital public assume également, au-delà de ces services, les conséquences de l’importance de son activité non programmée et accueille les personnes en situation précaire, dont le cas présente un caractère de lourdeur spécifique.

Ce constat est important, mais trop souvent occulté – on sait pourquoi – lorsque les activités de l’hôpital public sont comparées à celles des cliniques privées à but lucratif. Contrairement au secteur public, le secteur privé repose essentiellement sur une activité programmée et n’est pas soumis à de nombreuses dépenses médico-techniques en aval ou en amont. Le surcoût d’une activité non programmée est, je le rappelle, de l’ordre de 60 % par rapport à une activité programmée.

En outre, le périmètre d’activité des établissements publics est très différent de celui des établissements privés à but lucratif. Ainsi, en 2008, sur 799 groupes homogènes de malades, ou GHM, le panel des pathologies traitées en clinique en comporte, en moyenne, moins de 80, contre quelque 140 pour les hôpitaux publics, ainsi que je le soulignais récemment devant la commission des affaires sociales.

Non seulement ce panel est plus étendu dans le secteur hospitalier public, mais les pathologies traitées y sont également plus lourdes. Elles nécessitent donc des soins, notamment paramédicaux, plus importants, ce qui explique que les hôpitaux aient besoin d’un effectif de soignants plus fourni que les cliniques. Madame la ministre, mes chers collègues, je ne vous apprendrai rien en vous disant que, dans les comptes d’exploitation d’un hôpital, les dépenses de personnel représentent 70 % des crédits de fonctionnement, voire 80 % dans les hôpitaux psychiatriques.

De plus, les qualifications exigées du personnel, par exemple dans les blocs opératoires, sont plus strictes dans le secteur public, ce qui n’est pas sans incidence sur les budgets des hôpitaux.

C’est aussi pour toutes ces raisons qu’il convient de revoir l’ensemble des financements des missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation, les MIGAC, et de dissocier de l’activité courante le financement des urgences et de la permanence des soins.

J’observe au passage qu’aucun des pays recourant à la tarification à l’activité n’a envisagé qu’elle puisse représenter plus de 50 % du financement, tandis que nous prévoyons de la porter à 100 %...

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