Tout à l’heure, lorsque nous nous sommes abstenus sur un amendement de M. Philippe Marini, Mme Roselyne Bachelot-Narquin a reproché à notre groupe de pratiquer une politique de gribouille.
Or, quand je lis l’article 44, je me dis que le Gouvernement a véritablement dû « racler les fonds de tiroir » pour élaborer le présent texte, qui est tout sauf un projet de loi de financement de la sécurité sociale. Le Gouvernement fait seulement marcher la calculatrice pour savoir comment dépenser le moins possible et réaliser un maximum d’économies.
Nous demandons donc également la suppression de cet article 44, et ce pour plusieurs raisons, outre celles qu’a développées à l’instant notre collègue Guy Fischer.
Premièrement, le dispositif prévu est inéquitable. En effet, les personnes âgées qui habitent en ville auront accès à tous les médicaments, y compris les plus coûteux, tandis que les résidents en EHPAD se verront proposer une liste restreinte de molécules.
Deuxièmement, une telle mesure risque d’induire une inégalité dans l’accès aux innovations thérapeutiques. Ainsi, pour prendre l’exemple de la maladie d’Alzheimer, qui est un objectif de santé publique, nous savons que les nouveaux médicaments concernant cette pathologie sont très coûteux. Les personnes âgées ne résidant pas dans les EHPAD pourront en bénéficier facilement, celles qui sont hébergées en EHPAD n’auront pas forcément accès à l’innovation thérapeutique, et ce à cause d’une enveloppe budgétaire vouée à la restriction : il faudra bien que les EHPAD bouclent leur budget.
Troisièmement, et cela a été souligné tout à l’heure par M. Fischer, l’article 44 peut conduire les EHPAD à sélectionner les personnes âgées en fonction de leur pathologie pour maîtriser leurs dépenses médicales.
Quatrièmement, ce dispositif n’apporte pas de réelles garanties en termes de risques iatrogéniques. S’il faut effectivement lutter contre ce type d’accident, le moyen proposé dans ce texte n’est pas le bon, car les médecins de ville et les médecins coordonnateurs pourront continuer à prescrire séparément.
Cinquièmement, dans la réalité, cette mesure sera inapplicable et source de difficultés confraternelles : le médecin coordonnateur n’a aucun pouvoir hiérarchique sur le médecin de ville, que les résidents des EHPAD ont tout loisir de consulter.
En d’autres termes, non seulement l’article 44 ne règle aucun problème, mais il en crée de nouveaux. Il y a un grand risque de voir des patients atteints de pathologies réelles, mais ne relevant pas pour autant de l’hôpital, être refusés en EHPAD, car leur prise en charge sera jugée trop coûteuse et n’entrera pas dans le forfait.
Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, si vous pensez que je me trompe et que les choses ne se passeront pas ainsi, c’est que vous ne vous êtes jamais rendus dans un EHPAD, ou alors seulement avec votre machine à calculer. Mais allez donc voir ce qu’en pensent les gestionnaires des établissements ou les familles des résidents et des patients !