J'aurais pu m'exprimer sur chacune des dispositions qui ont été présentées dans la série d'amendements tendant à insérer des articles additionnels après l'article 25, mais je préfère intervenir de façon globale. Quelques observations s'imposent.
Je ne sais plus qui a dit que le Sénat n'était pas un office notarial, mais le moins que l'on puisse dire est qu'il n'a pas été écouté !
En effet, cette série d'amendements vise ni plus ni moins à adapter la fiscalité du patrimoine, des donations et des successions à la réforme du droit des successions et des libéralités, votée au printemps dernier. Mais les dispositions qui nous sont proposées vont bien au-delà de ce qui est admissible du strict point de vue de l'égalité devant l'impôt.
Le sens général de ces amendements peut être résumé. Tous visent à alléger la charge fiscale pesant sur les gros patrimoines transmis du vivant ou après le décès du détenteur. Il s'agit d'aller plus loin que le dispositif prévu en aménageant le régime des donations, par exemple, pour le rendre pleinement opératoire. Vous pourriez me dire que ce n'est pas le cas, mais laissez-moi vous donner un exemple. Si vous étiez l'heureux père de quatre enfants et grand-père de huit petits-enfants, vous pourriez - c'est l'amendement n° 13 rectifié bis - leur transmettre 440 000 euros sans le moindre frais.
Ces amendements visent donc à alléger, dans toute la mesure du possible, les droits existants sur les patrimoines de grande valeur transmis, quel que soit le mode de transmission et quelles que soient les modalités de réalisation de cette transmission puisque le fait que les héritiers ne s'accordent pas sur ces modalités pourrait, grâce aux amendements judicieux de M. Alain Lambert, être fiscalement neutralisé.
Bien entendu, de telles dispositions ne trouvent leur pleine application que pour les patrimoines conséquents. Elles n'ont donc pas grande portée sur les très nombreuses transmissions de patrimoines entre vifs ou après décès qui ne se traduisent pas par la perception d'un droit d'enregistrement. En fait, ces dispositions ne visent qu'à favoriser la mobilité des patrimoines et l'optimisation fiscale en découlant, notamment du point de vue de l'impôt de solidarité sur la fortune, pour les détenteurs des patrimoines les plus importants.
Nous avons déjà eu l'occasion de dire ce que nous pensions, par exemple, de la valorisation d'un patrimoine mobilier dans un contexte d'explosion de l'activité boursière ou de celle d'un patrimoine immobilier dans un climat de spéculation effrénée.
C'est donc le principe même d'égalité devant l'impôt qui est en jeu dans cette affaire, et c'est pourquoi nous rejetons l'ensemble de ces amendements.