Intervention de Alain Fauconnier

Réunion du 5 juillet 2011 à 10h00
Questions orales — Suicides d'agriculteurs

Photo de Alain FauconnierAlain Fauconnier :

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, ma question porte sur un problème qui, hélas ! tend à augmenter au sein d’une profession jusque-là préservée : je veux parler de l’évolution inquiétante du nombre de suicides chez les agriculteurs.

Selon l’Institut de veille sanitaire, l’INVS, le taux de suicide des agriculteurs est en effet trois fois plus élevé que celui des cadres, bien qu’il en soit moins fait état dans la presse et les médias, ce qui peut poser question. Certes, le suicide reste un mystère, et il l’est encore plus en milieu rural où les liens sociaux, le cadre de vie pourraient, dans l’esprit des gens, préserver de ces détresses.

En collaboration avec la Mutualité sociale agricole, la MSA, M. le ministre de l’agriculture a annoncé le 31 mars dernier, à Rennes, un plan de prévention du suicide dans le monde rural, et je m’en félicite. Est-ce pour autant suffisant pour endiguer ce fléau ? Je n’en suis pas persuadé. Trois mois après ces annonces, a-t-on des éléments d’appréciation sur leur mise en œuvre ?

Si tel était le cas, je vous serais reconnaissant de bien vouloir nous les indiquer.

Mais s’il est urgent de proposer un suivi psychologique adapté à la profession, il est tout aussi impératif, selon moi, d’agir sur les causes profondes du malaise dans le monde agricole.

En l’espace de deux générations, les campagnes françaises se sont radicalement transformées. On a demandé aux agriculteurs de rompre avec des modes de productions traditionnels, familiaux, ce qui pousse les exploitants agricoles à se positionner dans des processus de production plus intégrés, qui privilégient la seule rentabilité au lien à la terre et au pays.

Les agriculteurs peuvent ainsi tout perdre dans un laps de temps très court, soit par la volatilité des prix, soit par les aléas climatiques et sanitaires, qui, régulièrement, détruisent les productions.

Ils doivent, de ce fait, faire face non seulement à l’absence désespérante de perspectives, mais encore à l’insupportable pression des fournisseurs et des banquiers, avec tout ce que cela implique.

Cette profession est sans cesse montrée du doigt, notamment à l’occasion de chaque crise alimentaire ou environnementale. Ces réflexes médiatiques passent sous silence les efforts considérables réalisés par les agriculteurs pour améliorer les conditions de production en termes aussi bien de protection de la nature que de bien-être animal.

Si l’on ajoute les grandes inquiétudes quant à l’impact des phytosanitaires sur l’intégrité physique et la santé psychique des agriculteurs, on peut s’interroger sur les conséquences de l’ensemble de ces causes.

On voit bien que cette situation dramatique est la résultante d’une multitude de paramètres.

Cette succession de difficultés est perçue comme un échec personnel et pousse certains agriculteurs à commettre l’irréparable.

La loi de modernisation de l’agriculture devait apporter plus de sécurité et davantage de perspectives pour les producteurs, notamment à travers les notions d’assurance et de contrat de filière. Force est de constater que, dans ce domaine, la déception est grande et que la détresse des agriculteurs appelle à des actions urgentes.

Loin de moi l’idée d’imputer au ministre de l’agriculture une quelconque responsabilité face à ces drames humains qui nous concernent tous, quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégions. Toutefois, je souhaiterais connaître les premières évaluations du plan d’urgence qui a été mis en place en direction de cette frange d’agriculteurs fragilisés et les nouvelles mesures envisagées par le Gouvernement pour redonner de l’espoir à l’ensemble de la profession.

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