Il refuse également de revaloriser les salaires des fonctionnaires ; ces derniers sont sans doute trop gâtés, pour que leurs salaires soient ainsi gelés…
Pourtant, ce sont là deux leviers efficaces pour inciter à une augmentation générale des salaires.
Le Gouvernement se contente d’annoncer une série de rustines, de pansements : revalorisation du barème kilométrique, gel des tarifs du gaz, « panier des essentiels », etc. Et voici que, maintenant, vous nous faites le coup non de la panne mais de la prime !
En réalité, votre objectif, monsieur le ministre, est d’occuper la scène médiatique avec une prétendue réponse à la question du pouvoir d’achat. Mais la mesure phare de votre projet de loi, la fameuse prime, est injuste à plusieurs titres.
Tout d'abord, elle ne s’adresse pas à l’ensemble des Français. Ainsi, les fonctionnaires, qu’ils appartiennent à la fonction publique d’État, à la fonction publique territoriale ou à la fonction publique hospitalière, en sont exclus ! N’en auraient-ils pas pourtant besoin ?
Pis, les 5, 2 millions d’agents publics constatent avec amertume le gel de leur pouvoir d’achat, et ce depuis des années.
Même si l’on s’en tient au secteur privé, la prime ne concernera pas l’ensemble des salariés. Initialement, 8 millions d’entre eux devaient en bénéficier. Or elle ne sera finalement perçue que par les seuls salariés travaillant dans une entreprise de plus de cinquante salariés dans laquelle les dividendes versés aux actionnaires ont augmenté par rapport à la moyenne des deux années précédentes. Ce n’est plus la même chose : on passe de 8 millions à quelque 3 millions de bénéficiaires ! En quelques semaines, vous avez donc fait au moins 5 millions de déçus.
Ensuite, la prime est injuste parce que son montant ne sera pas homogène. En effet, elle ne sera soumise à aucun seuil minimal ou maximal. Selon les projections, elle sera de 700 euros en moyenne. Où est la justice dans un tel dispositif ?
Enfin, cette prime est injuste parce qu’elle ne touchera pas toutes les entreprises de la même façon. Seules celles qui verseront des dividendes en augmentation par rapport aux deux exercices précédents seront touchées. Ainsi, des entreprises comme Total ou Vinci – on pourrait compléter cette liste non exhaustive –, qui versent des dividendes frôlant l’indécence, en seront exemptées ! Cela revient, selon la logique déjà à l’œuvre dans l’article 1er de la loi TEPA de 2007, à avantager des entreprises dès à présent florissantes. C’est donc la logique même de votre projet que nous rejetons.
Les Français l’ont très bien compris : vos belles promesses se réduisent comme une peau de chagrin. Cette prime n’est qu’une illusion de plus pour celles et ceux qui éprouvent les plus grandes difficultés à boucler leurs fins de mois. C’est un coup d’esbroufe supplémentaire, voire une escroquerie intellectuelle ! Vous donnez une piteuse image du rôle du législateur en matière de pouvoir d’achat. Ce n’est ni sérieux ni moral !
Au final, la prime se dégonfle ou, pour reprendre une expression connue – sans vouloir faire de l’humour corrézien, monsieur Teulade –, elle fait « pschitt » !
Nous sommes donc très éloignés des promesses du candidat Nicolas Sarkozy, qui, dans un discours prononcé le 12 octobre 2006 à Périgueux, proposait « que le maintien des exonérations de charges pour les entreprises soit dorénavant conditionné à la hausse des salaires et à la revalorisation des grilles de rémunération fixées par les conventions collectives ». La proposition d’une règle des trois tiers, rappelée tout à l'heure, qui avait été formulée lors de l’intervention télévisée du 5 février 2009, a elle aussi été passée par pertes et profits…
J’ajoute que je ne comprends absolument rien à votre logique fiscale : il y a quinze jours, vous nous imposiez un débat sur la « règle d’or », censé déboucher sur un meilleur équilibre des finances publiques ; la semaine dernière, vous modifiez la structure de I’ISF ; et aujourd’hui, voici que vous créez une nouvelle niche fiscale !
Ce décalage, pour ne pas dire cette rupture, entre les discours et les actes pose la question de la crédibilité de votre parole politique. Toutefois, me direz-vous, les promesses n’engagent que ceux qui les reçoivent !
Demeure une certitude : ce n’est pas ce projet qui permettra de compenser la baisse du pouvoir d’achat des Français. Seule une véritable politique salariale le pourrait ; or vous refusez d’en conduire une.
À cet égard, je vous invite à lire le projet du Parti socialiste…