Intervention de Christiane Demontès

Réunion du 5 juillet 2011 à 14h45
Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2011 — Question préalable

Photo de Christiane DemontèsChristiane Demontès :

Je vous cite, monsieur le rapporteur, quand vous dites des vérités !

Enfin, concernant l’objectif national de dépenses de l’assurance maladie, l’ONDAM, le Gouvernement le maintient au niveau fixé dans la loi de financement de la sécurité sociale initiale.

Notre rapporteur général – je le cite encore ! – ne manque pas de faire remarquer que l’ONDAM a été respecté en 2010. Certes, mais à quel prix ? Si chacun sait que la santé publique constitue « une activité organisée de la société visant à promouvoir, à protéger, à améliorer et, le cas échéant, à rétablir la santé de personnes, de groupes ou de la population entière », chacun sait aussi que, comme l’écrit le professeur Grimaldi, « finalement, quand on met bout à bout les différentes mesures – franchises, dépassements d’honoraires, menaces de déconventionnement, développement du secteur privé à but lucratif –, on ne voit qu’une cohérence : la limitation de la part du financement par la sécurité sociale au profit d’un rôle de plus en plus important laissé aux assurances complémentaires, et en particulier aux assureurs privés ».

En 2010, 23 % des Français, contre 11 % en 2009, ont renoncé à des soins pour des raisons budgétaires. Mais cela ne vous a pas fait réagir, monsieur le ministre : vous gelez encore 400 millions d’euros de crédits hospitaliers. Tant pis pour la qualité des soins ! Tant pis pour le personnel soignant, qui ne peut plus faire face ! En guise de réponse, l’hôpital public n’a qu’à vendre son foncier, n’est-ce pas ?

J’en viens à la fameuse prime créée par l’article 1er. Elle fait suite à la remise du rapport Jean-Philippe Cotis, lequel avait constaté un écart considérable des revenus dans notre pays.

Rappelons quelques éléments essentiels illustrant les disparités existantes au sein ou entre des entreprises.

Un SMIC à temps plein est de 1 070 euros nets par mois. Le salaire du patron le mieux rémunéré du CAC 40, tout compris, est de 10, 75 millions d’euros par an, soit 835 SMIC ! Dans le secteur privé, le salaire moyen annuel des 10 % les mieux payés est de près de 39 000 euros quand celui des 10 % les plus mal payés est de 13 595 euros.

Enfin, le constat est fait que, depuis 1998, les revenus salariaux ont évolué de manière très inégalitaire. Ainsi, la croissance a été de plus 51, 4 % pour les 0, 01 % les plus riches, de plus 29, 2 % pour les 0, 1 % les plus riches, de plus 13, 6 % pour les 1 % les plus riches et de plus 3, 1 %... pour 90 % des salariés !

Et pendant ce temps, comme le rappelle à juste titre M. Vasselle, « la part des dividendes a quasiment doublé depuis dix ans ».

Dire que la question salariale, et donc celle de justice, est cruciale est une lapalissade. Mais de là à penser qu’une prime ponctuelle, fût-elle de 1 000 euros, parvienne à rétablir un peu d’équilibre et de justice dans la répartition des revenus… Cela procède d’une vision très particulière de la justice, et nous ne la partageons pas.

C’est donc dans ce contexte que le Président de la République a annoncé une opération de grande redistribution. Les réactions à cette annonce électorale ne se sont pas fait attendre.

Le patronat y voit, comme à son habitude, une mesure contraignante, inadaptée, néfaste pour l’économie.

Du côté des syndicats de salariés, cette prime vient percuter la négociation salariale. En effet, versée, elle ne manquera pas d’être considérée par les employeurs – vous l’avez dit aussi, monsieur le ministre – comme une partie importante de l’augmentation annuelle des salaires. Voilà pourquoi ils ont considéré qu’il s’agissait d’une atteinte au dialogue social et à leurs prérogatives.

Quant aux caisses, que ce soit la CNAMTS, l’ACOSS ou la CNAF, elles ont toutes déploré le peu de temps laissé à l’examen de ce texte, et pointé notamment la non-compensation aux régimes de sécurité sociale des exonérations de cotisations.

Souvenons-nous que cette annonce a été faite en même temps que le traitement des 5, 2 millions de fonctionnaires était gelé.

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