Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, au nom de mon groupe, je viens rendre publiquement hommage aux soldats français qui sont en Côte- d'Ivoire pour sauvegarder la paix.
L'agression aérienne dont ils ont été victimes est inadmissible. Le bombardement du cantonnement des forces françaises de Bouaké doit faire l'objet d'une enquête minutieuse. Les responsabilités doivent être pleinement établies.
Au-delà de nos soldats, nous avons une pensée pour toutes les victimes que ce conflit a faites : les journalistes Jean Hélène et Guy-André Kieffer, disparu, ainsi que celles de ces derniers jours, tous ces manifestants entraînés par des meneurs irresponsables, ces Français, heureusement en petit nombre, dont nous sommes sans nouvelles.
En Côte-d'Ivoire, nous pensons que le rôle de la France est clair.
Il a été d'empêcher une guerre civile qui semblait inéluctable voilà trois ans, de préserver les vies humaines, notamment celles des ressortissants français, nos compatriotes, dont le présent et l'avenir nous préoccupent. En tant que sénateur représentant les Français établis hors de France, je m'inquiète toujours de ce qui se passera une fois que les caméras auront cessé de filmer les retours dramatiques à Roissy, car c'est à partir de ce moment-là qu'il y a des problèmes et qu'il faut s'en occuper.
Le rôle de la France a également été, et continue à être, de consolider l'ordre institutionnel ivoirien, afin que des élections ouvertes et sans discrimination aient lieu au moment prévu et apportent l'ordre et la stabilité. Tout le reste est procès d'intention.
La France agit avec un mandat de l'ONU, elle n'est pas en Côte-d'Ivoire pour défendre ses intérêts nationaux.
Il est nécessaire de faire admettre au président Gbagbo et à son gouvernement, ainsi qu'à l'opposition, que les affrontements armés dans lesquels ils s'obstinent entraînent la Côte-d'Ivoire dans une spirale de massacres interethniques dont l'histoire africaine récente donne trop d'exemples.
Il est nécessaire que le président Gbagbo parle clairement et prenne ses responsabilités de chef d'Etat. Or, jusqu'ici, nous estimons que cela n'a pas été suffisamment le cas.
Pour l'avenir, oui, monsieur le ministre, nous en sommes bien d'accord, il faut une solution politique, et non militaire. Mais laquelle ?
La politique menée par la France et que nous avons soutenue est-elle en échec aujourd'hui ?
Les accords de Marcoussis et d'Accra sont-ils encore viables ? Les signataires ivoiriens honoreront-ils un jour leur signature ? N'est-il pas temps de redéfinir les missions de la France dans ce pays ? Le moment n'est-il pas venu d'obtenir que les forces françaises soient relayées par une force européenne, à l'appui de celle de l'ONUCI ? Il est trop facile, pour des agitateurs, de qualifier les forces françaises de forces d'occupation néocoloniales. Des forces européennes seraient probablement moins victimes de ce type d'interprétation.
Nous devons aussi envisager l'avenir de la politique africaine du Gouvernement. Les accords de défense sont-ils encore des outils adaptés ? Ne sont-ils pas des outils d'un autre siècle qui ne contribuent plus à consolider nos relations avec les Africains ? Le Parlement devrait, selon nous, se saisir de cette question.
Pour terminer, j'en reviens à l'ONU.
La déclaration du Conseil de sécurité de dimanche dernier a réaffirmé le soutien de la Communauté internationale à l'action de la France et à celle de l'ONUCI. Il reste à adopter une résolution de l'ONU apportant des précisions sur les moyens de réussir le désarmement et l'embargo général sur les armements, sur le respect des droits de l'homme par toutes les parties en présence et, enfin, - vous l'avez dit hier, monsieur le ministre, et cela nous paraît très important - sur les sanctions internationales encourues par toutes les parties qui violent le droit et les accords internationaux, toutes les parties qui, masquées ou non, commettent des crimes contre l'humanité.
La France joue un rôle important. Monsieur le ministre, nous souhaitons qu'elle continue à le jouer, mais nous pensons que plus des forces internationales agiront, plus nous serons efficaces.